ECONOMIE POLITIQUE INTERNATIONALE/INTERNATIONAL POLITICAL ECONOMY

 

 

 


Référendum constitutionnel européen et Turquie:

 

Pour un Comité de Défense de la République et de la gauche contre les fossoyeurs de la France, des Nations et de l'Europe sociale

 

En Italie, les tenants du Projet Constitutionnel Européen (PCE) admettent sans gêne qu'il s'agit d'un projet fédéraliste destiné à se débarrasser des Nations et des Etats-Nations. Les Nations en tant que telles sont considérées comme des formes de regroupement archaïques. Les Etats-Nations, lieux d'organisation du pouvoir politique mais également dépositaires de la souveraineté inaliénable des peuples, sont particulièrement honnis. On désire donc s'en débarrasser pour supprimer l'ultime barrière qu'ils opposent à l'établissement d'une Europe fédérale, partie intégrante de l'Empire. Cette candeur ne tient pas au fait que l'Etat-Nation en Italie soit relativement jeune et encore relativement peu uni. Elle tient surtout au fait que le débat contre le PCE n'a pas vraiment lieu. Au sein même des directions politiques des partis de gauche, des considérations électorales sans grande inspiration marxiste les poussent à une alliance avec le centre-gauche en échange de quelques sièges électoraux (ainsi que de la promesse dalémienne passablement risquée de supprimer le scrutin proportionnel afin de les marginaliser, une fois pour toute!). Le PCE est donc un enjeu de premier plan, car il n'est pas ce qu'il devrait être s'il avait été conçu pour le bien du prolétariat européen, pour celui de l'Italie ou des autres Nations européennes. Les personnalités historiques du confédéralisme républicain de gauche sont ainsi données comme de fervents précurseurs de la dérive fédéraliste, anti-nationale et anti-républicaine actuelle.  

 

En toute candeur ce que je crains le plus ces temps-ci, c'est une erreur de stratégie référendaire qui mènerait à la défaite historique, donc de très longue durée, de la gauche. Non pas que je prétende avoir la bonne solution. Les militant-e-s et les dirigeant-e-s doivent en discuter sereinement afin d'être en mesure de choisir collectivement et démocratiquement. Ce que je prétends cependant, c'est que j'ai le courage personnel de regarder en face une réalité que les partis et les groupes de gauche n'ignorent pas, mais qu'ils passent sous silence trop souvent. Ceci fut prouvé de nouveau lors des manipulations policières montées contres les mouvements italiens qui étaient opposés à la guerre d'Irak, des manipulations que, parmi d'autres, j'ai essayé de contrer sans fards. Il se met doucement en place un hégémonisme nietzschéen impérial croisé de très mauvais aloi, un mouvement dont le nom des porte-parole attitrés devraient porter à rire s'il n'était de la servilité des médias dominants ainsi que de nombre de faiseurs d'opinion ou d'académiques. Ainsi on cherche aujourd'hui à nous faire un odieux quoique caractéristique chantage ''à la haine'' pour empêcher la dénonciation républicaine, seule digne de l'héritage de la Résistance et de l'Holocauste non-sélectif, pour mieux dissimuler la déportation en cours du peuple palestinien allant de pair avec l'expropriation des 22% des terres du Mandat palestinien qui restent encore à ce peuple martyrisé. Pourtant, taire cette monstrueuse déportation contemporaine n'est pas le meilleur moyen de désamorcer ''la haine'' imputée à l'emporte-pièce, toujours sans preuve, à un adversaire qui a, coup sur coup, offert les Accords d'Oslo et les Accords de Genève, ni le meilleur moyen de s'honorer soi-même, que l'on soit juif ou gentil ou tout autre chose. Or, que cela plaise ou non, cette stratégie va main dans la main avec la stratégie impériale d'origine étrangère qui mine aujourd'hui l'Europe. Elle ne contribue pas non plus à permettre une distinction instinctive antre anti-sionisme de droite et anti-sémitisme, des distinctions dont j'affirme qu'elles n'étaient pas à la portée intellectuelle ni morale de ces ''pseudo-nihilistes éveillés''. Les porte-parole de second ordre de l'une comme de l'autre stratégie impériale et colonialiste sont d'ailleurs les mêmes. Les partis et les groupes de gauche ne sont pas immunisés contre cette abominable hégémonie de façade qui ne fonctionne qu'à la censure et à l'auto-censure, toutes deux suicidaires à la longue. Ils ne sont pas non plus immunisés contre un entrisme idéologique et électoral connu. Les militant-es tout comme les dirigeant-e-s doivent donc garder les yeux ouverts, ils et elles doivent savoir si oui ou non ils et elles veulent tout faire pour gagner cette bataille cruciale pour l'avenir de la gauche elle-même, avant même de l'être pour l'avenir de  l'Europe sociale. Si la réponse est positive, je ne pense pas qu'on puisse faire l'économie de l'union référendaire non-partisane de toutes les forces de gauche et de leur coordination européenne afin de créer une masse critique contre-hégémonique. Après tout ''Wir sind das Volk''.  Si d'autres alternatives existaient elles devraient être discutées publiquement très rapidement afin que la gauche soit fin prête pour la prochaine campagne référendaire.

 

Les fossoyeurs de la France et des Nations européennes sont à oeuvre désormais, à visage presque découvert. Ils doivent être défaits, sans ménagement. Il convient d'expliquer aux citoyennes et citoyens de quoi il retourne réellement, sans se laisser retenir par des considérations faussement morales, qui ne visent en réalité qu'à protéger les nihilistes soi-disant éveillés.

 

Il est donc impératif de placer le NON de la gauche, toutes tendances confondues, au-dessus des partis. Il faudrait créer une organisation unique dont le nom ne laisserait aucun doute sur l'urgence des objectifs à atteindre. Elle pourrait s'appeler ''Comité de Défense de la République et de la gauche contre les fossoyeurs de la France, des Nations et de l'Europe sociale''.

 

Cette approche oecuménique, progressiste autant que de gauche, se démarquerait ainsi des formations anti-européennes de droite puisque nul n'ignore que nous sommes en faveur d'une Europe des Nations confédérale et démocratique. Mais pour nous, il s'agirait d'une Union européenne très solide, dotée d'une autonomie politique, socio-économique et de sécurité qui interdirait d'en faire jamais le satellite d'aucun empire putatif ou à venir.

 

L'intérêt de cette démarche oecuménique me semble évident.

 

A) D'une part cela permettra de supprimer les réticences que les électrices et les électeurs pourraient avoir envers certains aspects du programme des partis politiques de gauche impliqués dans la campagne contre le PCE actuel et en faveur d'une authentique Europe sociale. Ces réticences partisanes plus ou moins rationnelles doivent donc être supprimées par le choix de l'organisation référendaire placée au-dessus des combats strictement partisans. Il s'agit de la Constitution européenne, donc du cadre légal de notre vie commune dans les décades à venir, il ne s'agit pas de programme individuel de parti.    

 

B) Cela permettra également aux partis impliqués activement dans la campagne de ne pas confondre leur opposition commune au PCE pour un programme électoral commun sur lequel se chamailler. Au prochain référendum, il s'agit de sauver l'avenir des Etats-Nations, dont celui de la France, au sein d'une Europe conservant ses chances de devenir un jour économiquement et politiquement autonome. Pour cela, il suffira de l'accord de principe sur quelques points vitaux qui garderont l'avenir ouvert et préserveront toutes les chances de l'Europe sociale dans la Constitution qu'il s'agira de réécrire, cette fois-ci de manière démocratique. Entre-temps, le danger immédiat pour l'intégration européenne est écarté puisque le rejet du PCE n'affectera pas le Traité de Nice. D'ailleurs, ce Traité de Nice ainsi que le rejet du PCE créeront, tout naturellement et sans heurts, les conditions favorable pour une réécriture du traité constitutionnel européen.

 

C) Le ''Comité de Défense de la République et de la gauche contre les fossoyeurs de la France, des Nations et de l'Europe sociale'' pourra alors aller au coeur du sujet: il opposera une Confédération démocratique et sociale, capable de tenir son rang dans le monde, à un fédéralisme censitaire uniquement pensé pour être subordonné à l'Otan et à l'Empire. Les bases militaires étrangères furent fermées en France depuis 1966. Ce n'est pas le temps de les rouvrir ni d'assumer le rôle de ''servi in camera'' de l'Empire. Ce n'est là ni la vocation de l'Europe ni la vocation de la France.

 

D) Finalement un tel Comité parapluie permettra de regrouper tous les militant-e-s et dirigeant-e-s des partis politiques ou groupes d'intérêts et organisations syndicales, qui voudront joindre leurs forces dans cette nouvelle union de la gauche destinée, sinon à changer immédiatement la vie, du moins à éviter qu'elle ne nous soit expropriée par les Jeffrey Sachs et les Beresovski de chez nous. Les partis et associations spécifiquement de droite ne seront pas inclus dans ce Comité, afin de ne pas créer de confusion sur les motivations ainsi que sur les finalités qui doivent rester fondamentalement républicaines et de gauche. Néanmoins, la forme d'organisation choisie, le Comité de défense placé au-dessus des partis spécifiques, permettra aux militants et aux citoyens d'où qu'ils viennent d'adhérer à cette union afin de gagner le référendum et ainsi de sauver l'avenir. Un avantage supplémentaire viendra tout naturellement de ce que personne au sein de ce Comité ne s'identifiera d'abord par son appartenance partisane. Cela sera fait d'abord et avant tout en tant qu'opposant du PCE néolibéral et comme partisan d'une confédération démocratique de l'Europe des Nations, seule porteuse de l'Europe sociale. Ainsi, nous n'aurons pas à savoir si tel dirigeant ou tel militant provient de l'extrême gauche, de la gauche réformiste, centriste ou encore réformiste révolutionnaire ou s'il vient du PS, afin de voter selon sa conscience d'électrice ou d'électeur sachant jouir du secret du scrutin. (Certaines électrices et certains électeurs du PS peuvent être tiraillés par le désir de ne pas nuire à leur parti en déclarant leur opposition ouverte au PCE de manière publique et partisane, suite au référendum interne au PS. Mais ils ne désirent pas pour autant être réduits à l'abstention par respect pour leurs convictions personnelles.) Par conséquent, il serait sans doute bon que quelques personnalités, provenant ou non de partis spécifiques, soient unanimement désignés par les organisations participantes afin de diriger la campagne référendaire et planifier l'intervention coordonnée des dirigeants lors des meetings communs. Bien entendu, sur la base des idées clés retenues pour faire campagne (voir par exemple ci-dessus), les partis, les syndicats et les groupes de pression organiseront également leurs propres meetings mais sans jamais confondre la campagne référendaire pour une campagne politique spécialement liée à leur parti ou groupe. La loyauté et la discipline sont ici de rigueur. Il n'est pas interdit de penser que cette attitude ne permettra ensuite, après la victoire référendaire, de penser à la rédaction d'un programme commun de la gauche tout à la fois républicaine et internationaliste en vue d'autres échéances.

 

E) Le Comité se déclarera sans faux tabous contre la politique actuelle qui consiste à faire poiroter indéfiniment la Turquie aux portes de l'Europe. La Turquie actuelle n'a plus à servir de flanc sud de l'OTAN pour contenir l'URSS. Elle a donc moins que jamais vocation à entrer dans l'Union européenne. N'hésitons pas à dénoncer toutes les arrière-pensées liées au dossier turc. En vérité, il ne s'agit de rien d'autre que d'empêcher la création d'un marché commun moyen-oriental qui évoluerait avec ses ressources propres quoique en étroite association avec l'UE et la Communautés des Etats Indépendants, tout en conservant des relations soutenues avec les USA. Ce marché commun moyen-oriental est justement ce que l'équipe nietzschéenne impériale dans l'entourage de G. W. Bush , les  Wolwofitz et leurs alliés, essaie désespérément de tuer dans l'oeuf par le projet nietzschéen de ''Grand Moyen Orient'' placé sous la coupe conjuguée de Washington et Tel Aviv. Ce marché commun moyen-oriental comprendrait la Turquie, l'Irak, l'Iran, la Syrie, le Liban, Israël, la Palestine et la Jordanie. Pourrait s'y associer l'Égypte. Les pétro-monarchies ne seraient aucunement visées. Du coup, ce marché commun moyen-oriental unirait le capital humain, de surcroît jeune, avec le pétrole et une population de plus en plus lettrée et solvable: le développement économique, scientifique et culturel en serait accéléré. Cet ensemble moyen-oriental servirait alors d'exemple à la nécessaire recomposition socio-économique du Maghreb, dans le respect de Ibn Kaldhun, un ensemble propre à marcher vers un islamisme républicain, égalitaire, fraternel, par conséquent de nouveau libre et prospère. Ces ensembles garantiraient le respect des frontières existantes ainsi que la non-ingérence dans les affaires internes - politiques ou religieuses- de leurs Etats membres.  (voir la section sur l'islamisme dans ce même site.)

 

En réalité, il n'y a pas plus de raison de craindre la résurgence de l'empire Ottoman par le biais de ce marché commun que de craindre la transformation du marché commun européen ou de l'UE actuelle en nouveau Saint Empire Germanique, puisque ce marché commun fut conçu, bien avant le PCE proposé aujourd'hui, comme une confédération d'Etats-Nations souverains, capables de déléguer une partie de leur souveraineté lorsque cela pouvait servir des intérêts communs bien définis. Le marché commun moyen-oriental suivrait la même logique d'intégration visant à maximiser la paix, la sécurité et la prospérité économique. L'entrée de la Turquie au sein de l'UE, procédure qui traînera fatalement en longueur et sera in fine soumise à l'improbable acceptation unanime de tous les pays membres de l'UE,  détruirait, en effet, les chances de développement de la Turquie, du Moyen-Orient et de l'Europe. Pour servir l'Empire on mettrait ainsi l'Europe et sa politique de coopération méditerranéenne en danger.

 

Si les élites et franc-maçonneries fédéralistes européennes se sont mises en tête de rebâtir l'empire de César Auguste en Méditerranée, soit! Mais qu'elles le disent clairement, les citoyens choisiront alors en toute connaissance de cause. Ils demanderont peut-être l'intégration à part entière de l'Algérie avant ou simultanément à celle de la Turquie. On ne voit d'ailleurs pas comment cette candidature algérienne pourrait être refusée puisque le pays fut partie intégrante de la République française pendant de longues années. A moins, bien entendu, que l'Algérie, riche en pétrole et en capital humain, ne choisisse d'oeuvrer pour une intégration nord-africaine qui lui permettrait de négocier d'égale à égale avec l'UE, ou du moins de ne plus être en état de faiblesse permanente.

 

Malgré ce que l'on entend, il est nécessaire de  coupler cette entrée de la Turquie avec l'actuel PCE. Ceci devrait être évident. Après l'adhésion des pays Baltes, après l'éclatement provoqué de l'ex-Yougoslavie, cette entrée est conçue comme l'élément principal permettant de renforcer l'Otan en Europe afin de transformer à jamais le projet d'intégration européen en plate-forme impériale dans le but de contrôler simultanément le Moyen Orient et l'Eurasie. L'Empire n'a pas d'amis, il n'a que des alliés subalternes. Or, ce statut ne représente la vocation ni de la Turquie, ni du Moyen Orient ni de l'Europe quoiqu'en pensent les ''servi in camera'' autoproclamés, qui, au fond d'eux-mêmes, se rêvent les maîtres du monde. C'est de plus une stratégie de guerre contre l'Irak, le Moyen-Orient, et, ne le cachons pas, contre la Fédération russe. La guerre attire la guerre en retour pour des raisons de légitime défense et-ou de Raison d'Etat. Ce n'est pas là la voie démocratique de l'Europe.

 

La laïcité de la Turquie n'est pas plus en cause que ne peut l'être celle de la Syrie ou que ne l'était celle de l'Irak avant sa pastoralisation par les sionistes chrétiens et alliés. Cette évidence est tue soigneusement par tous les fervents défenseurs de la stratégie visant à mettre la Turquie indéfiniment en attente dans l'anti-chambre européenne tant que la reconstruction du temple et du Grand Israël ne sera pas menée à bon port. Certaines signatures de faiseurs d'opinion ont valeur de révélateurs de programmes. C'est d'ailleurs une pastoralisation aujourd'hui soumise à l'obligation d'accepter les OGMs américains, sans doute dans le respect sélectif impérial des Conventions de Genève! La modernisation de même que la démocratisation du Moyen-Orient ne pourront pas se faire en le divisant à l'instar des anciennes forces coloniales, c'est-à-dire en séparant soigneusement les ressources pétrolières d'avec les populations autochtones. Or, le développement harmonieux de l'Europe supposerait plutôt un Moyen-Orient prospère et indépendant, capable de commercer à un très au niveau technique mettant en cause d'importants volumes d'échange avec l'UE.

 

Rappelons que le Détroit des Dardanelles est une voie de navigation internationale. Son libre accès n'est pas en question. En tout état de cause ce n'est pas un goulot d'étranglement pour l'Union européenne, de sorte que celle-ci ne peut en aucun cas souhaiter qu'il le devienne pour aucun autre pays ou ensemble économique. Faut-il rappeler que l'Europe n'a pas de visées impériales au Moyen-Orient et qu'elle défend encore la Charte de l'ONU (principe repris dans le PCE mais entaché par l'élargissement et le renforcement de l'OTAN). Ce faisant, elle soutient un monde multilatéral et multinational reposant sur la paix et le rejet de toutes guerres offensives, surtout préventives. En outre, la vulnérabilité pétrolière de l'UE est très inférieure à celle des USA ou d'Israël. Elle dispose d'un parc nucléaire sûr et performant. Elle oeuvre pour le développement des énergies alternatives aux énergies fossiles polluantes. Elle dispose également de sources d'approvisionnement pétrolier autres, plus compatibles avec l'origine d'une partie importante de sa population culturellement musulmane. Rappelons que l'UE, contrairement aux USA, a signé l'Accord de Kyoto. Ceci veut dire au minimum qu'elle ne lancera pas de guerre préventive pour conserver son droit de gaspiller les ressources de la planète, ainsi que l'avait déclaré Bush père au Sommet de Rio (''le niveau de vie américain n'est pas négociable''). La Turquie n'a pas de pétrole. Elle ne pourra pas avoir accès à cette ressource tant qu'elle sera séparée artificiellement de sa région naturelle. C'est d'ailleurs ce crime colonial perpétué aujourd'hui encore qui pousse les dirigeants turcs à passer par l'Europe pour réhabiliter leur pays. Rien d'autre. Comment croit-on que les Turcs pourront enseigner leur passé ou développer leur culture propre sans schizophrénie grave en étant coupés de toute leur histoire spécifique par une appartenance politique forcée à l'Europe?

 

Le rôle de l'Europe, dans ses frontières propres, est d'appuyer la démocratisation, la laïcisation progressive et le développement économique de l'ensemble du Moyen Orient. Pour cela, elle doit appuyer la réintégration de la Turquie dans sa région naturelle, plutôt que de chercher de manière très nietzschéenne à l'en séparer pour très longtemps. Israël n'aurait, pour sa part, rien à perdre et tout à gagner d'un tel marché commun moyen-oriental puisqu'elle y participerait en bénéficiant d'un énorme avantage technologique sans pour autant perdre ses connexions avec l'Occident. Mais pour cela, elle devra accepter la création préalable d'un Etat palestinien, indépendant et viable, avec Jérusalem Est pour capitale. Faut-il sacrifier la Turquie aussi bien que le Moyen-Orient sur la volonté de quelques dirigeants sionistes en rupture avec leurs propres racines idéologiques d'origines? Certes non. Mieux vaudrait alors suspendre l'aide de quelque 3 milliards de dollars accordée annuellement par l'Europe à Israël tant que ce pays ne respectera pas la loi internationale ainsi que les droits inaliénables du  peuple palestinien. Le pire est que leur projet de Grand Israël et de destruction d'Haram al-Sharif qui en découle est voué à l'échec, avec ou sans l'entrée de la Turquie en Europe. Il s'agit-là d'une évidence liée à la nature du pouvoir politique que l'arrogance aveugle ne peut d'ailleurs que renforcer. Les meilleurs amis d'Israël, du temps de Stalingrad comme maintenant, ne sont pas forcément ceux qu'on croit - Pour le dire plus brutalement, au vu de certaines promesses de destruction et de conversion parousiastiques, ils ne sont pas forcément ceux qui le prétendent aujourd'hui du haut d'une demie naissance, arborée de fraîche date à tort comme un bel étendard croisé parce que c'est une mode bien vue. ''The times are a-changing'', chantait jadis Bob Dylan en s'en prenant simultanément à tous les faucons qui prétendaient avoir ''dieu'' dans leur manche.

 

De plus, tous les prétendus défenseurs de l'entrée de la Turquie dans l'UE oublient de dire ce qu'ils feront  du peuple kurde. L'entrée de la Turquie en Europe doit-elle avoir pour fonction d'interdire les relations inter-tribales qui chevauchent les frontières turque, irakienne, syrienne, et iranienne?  Veut-on couper les Kurdes trucs de tout contact avec les dizaines de millions de Kurdes iraniens, iraqiens et syriens, sous prétexte d'Europe? Qu'on nous épargne les boniments, car la réalité quotidienne actuelle pour les Kurdes c'est déjà la trahison américaine et européenne (y compris celle des dirigeants italiens contre le camarade Ocalan). Pour le reste, c'est Schengen avec en prime les désastres causés par Schengen partout en Méditerranée. Nous disons : Bas les masques! Ne divisons pas les peuples en prétendant les aider. Traitons-les comme des égaux, donnons leur notre support diplomatique et fraternel pour que leur égalité puisse s'épanouir. De fait, les organisations progressistes kurdes, de chaque coté des frontières qu'elles chevauchent, devraient se faire les porteurs de cette vision alternative d'un marché commun moyen-oriental dépourvu de toute ingérence extérieure et reposant sur l'intangibilité des frontières actuelles, le respect méticuleux des droits des minorités nationales ainsi que le respect de droits humains. Le camarade Ocalan a déjà posé un jalon important dans ce sens-là en tendant courageusement la main au gouvernement turc qui pourtant ne semble pas avoir compris la portée historique de ce geste. Ce respect des droits fondamentaux est également contenu dans leurs traditions culturelles d'origine, malgré ce que certains occidentalo-centristes nietzschéens, plus au moins ouvertement musulmanophobes, prétendent aujourd'hui sans vergogne, d'un coté comme de l'autre de l'Atlantique. J'en veux pour preuve la Charte des droits islamiques dérivée de la Déclaration des droits de la Personne de l'ONU, à la rédaction de laquelle participa M. Ben Bella.

 

Il reste un formidable non-dit de la question truque qui regarde les Européens eux-mêmes, en dehors de toutes fausses considérations sur la laïcité ou sur l'intégration de l'immigration de culture musulmane, qui de toute manière devra être accélérée pour tous les groupes déjà installés en Europe. Il s'agit de l'équilibre entre les anciennes puissances qui formaient le vieux Concert de l'Europe, concept belliqueux que l'intégration européenne, à son meilleur, avait justement pour vocation de remiser aux oubliettes de l'Histoire. Dans une Europe fédérale telle qu'elle émergera du PCE, l'entrée de la Turquie fera naturellement naître un axe Berlin-Ankara sans que personne ne puisse s'y opposer. (C'est d'ailleurs ce que visent certains spécialistes attardés de géostratégie, tant au Pentagone qu'en Europe.) Cela tiendra tout simplement au fait que l'Allemagne et la Turquie seront les principales puissances démographiques, avec une Turquie bien placée pour détrôner l'Allemagne à ce chapitre-là d'ici quelques années. Mais le poids économique ne sera pas proportionnel au poids démographique.  (Ajout: Soulignons ici que l'Europe philo-sioniste nietzschéenne anticipée dans le TCE milite pour une régionalisation absolue construite sur le dépérissement induit des Etats-nations membres; l'Etat-nation, creuset de la souveraineté du peuple contre la pseudo-souveraineté de droit divin des castes ou des ordres sociaux, doit en effet disparaître pour laisser la place à la domination néo-mercantile sans partage des firmes transnationales appuyées sur l'axe impérial Washington-Tel-Aviv. Dans un tel cadre, le dépeçage de la Turquie sera rapidement porté à terme comme le fut celui de l'Empire Ottoman, assorti par la création d'un nationalisme monarchique arabe subalterne nécessaire pour libérer le Canal de Suez et la Mer Rouge. Le moment venu il sera plus aisé de morceler une Turquie ne sachant pas composer avec ses Kurdes qu'il ne le fut pour l'Iraq ou pour une courageuse et intelligente Libye. Une telle Turquie démembrée au sein de l'Europe ne disposera même plus du faible avantage démographique-électoral au Parlement de Strasbourg ...) Les fonds structurels européens sont d'ores et déjà en baisse constante car l'argent disponible doit être partagé entre plusieurs nouveaux adhérents. Ceci survient à un moment où il est mal aisé de faire augmenter le budget européen. S'ajoute partout la baisse de l'assiette fiscale des Etats. Elle est grugée par l'impact du monétarisme ambiant sur le travail à temps plein, ce qui réduit d'autant les revenus provenant de l'impôt sur le revenu ou de la TVA. Ajouter à cela que la constitution de cercles concentriques, de ''champions'' industriels ou de ''noyaux durs'' sera sabotée par l'Antitrust autant que par la constitutionnalisation de la "concurrence libre et non faussée" (!) et vous aurez-là la recette pour un nouveau désastre qui débutera en Europe et au Moyen-Orient, mais qui n'épargnera aucune région de la Méditerranée. L'Allemagne a tort de croire que l'Antitrust européen épargnera ses banques régionales si utiles pour restructurer et épauler ses grandes firmes multinationalisées. Le travail de sape a d'ailleurs déjà commencé alors que des Fonds Ouvriers authentiques qui pourraient légitimement prendre la relève de ces institutions bancaires n'existent nulle part dans la zone euro. (Il est vrai que le PCE rendra la constitution de ces Fonds Ouvriers malaisés: les éventuelles régimes d'épargne-retraite seront par conséquent abandonnés au capital spéculatif à court terme, conjointement avec les droits sociaux qu'ils sont sensés incarner.) Diviser pour régner, voilà la loi pérenne des empires, tous naturellement prévus pour durer mille ans. Jadis, la réponse des ''légistes'' fut d'éradiquer l'Etat dans l'Etat avant qu'il ne fut trop tard. Pour le bien de la Turquie, du Moyen Orient, de la Méditerranée et de l'Europe. Et pour le bien de la paix dans le monde.

 

Il va de soi que si la gauche perdait ce référendum, et que la Turquie était admise au sein de l'UE, elle ferait alors tout pour intégrer le prolétariat turc dans ses rangs. Cela doit également être dit haut et fort. De plus, elle veillerait à ce que la Turquie ne soit pas utilisée par une Europe momentanément vassalisée contre les intérêts fondamentaux des autres peuples du Moyen-Orient, en particulier les peuples kurde, israélien et palestinien. Mais pour l'heure il ne s'agit pas d'autre chose que d'un impérialisme expansionniste des franc-maçonneries européennes  aussi ''sage'' que celui du Chancelier Kohl voulant précipiter le nettoyage idéologique dans l'Est européen au prix du sabotage de l'économie allemande! Pour le malheur de nos francs-maçons post-illuminés et fédéralistes, ce retour en arrière ouvre la voie à la réduction de l'Europe et d'eux-mêmes au rôle de sous-fifres d'un empire théocratique croisé qui a peu à voir avec l'évolution séculière du continent et l'acquis humaniste des Lumières.            

 

Ainsi que nous l'avons dit plus haut, cette organisation oecuménique placée au-dessus des partis se concentrerait sur quelques points essentiels. A savoir:

 

1) La dénonciation du catéchisme néolibéral ''de la concurrence non faussée'' comme ''objectif'' principal de l'Union européenne. Le projet constitutionnel n'est pas un traité comme un autre. C'est une constitution qui crée de nouveaux droits. Or, ces droits joueront en faveur des firmes capitalistes européennes, ou installées en Europe, capables de payer des équipes d'avocats pour faire respecter leurs droits contre toute intervention étatique. En ce qui nous concerne ici, il importe de souligner que cela sera surtout vrai pour toute velléité interventionniste du Conseil européen. Dans l'optique des négociateurs français cette instance devait demeurer l'organe décisionnel suprême et donc le garant du droit ultime des Etats. Il ne l'est plus, de fait. En tout cas, il ne saurait plus l'être s'il s'entiche de respecter la concurrence libre et non faussée qui sert de règle principale au sein de l'Union européenne autant que dans les rapports que l'UE entretiendra avec le monde extérieur, par exemple au travers de l'OMC. Il ne s'agit pas ici de réductionnisme économique. Il s'agit plutôt de l'esprit et de la lettre de cette mauvaise constitution qui doit être analysée selon les dynamiques économiques, sociales et culturelles qu'elle favorise ou au contraire qu'elle étouffe. Ainsi, les services publics sont considérés comme des monopoles à détruire à court terme. Ceci à l'heure où l'UE négocie au Gats la libéralisation de tous les services après avoir complété la libéralisation du commerce des biens. Parler de ''services publics'' abandonnés au secteur privé est pourtant une absurdité déjà démontrée par le fiasco californien (voir ''Biens publics:sauvons ce qui peut encore être sauvé'' dans la seconde partie de Tous ensemble .p 96) Aucune forme d'Etat social ne sera plus possible, ni au niveau européen, ni au niveau national, si le PCE est approuvé. Pire, la notion anti-économique et purement anti-scientifique de concurrence non faussée nous renvoie à une idéologie économique de classe pré-keynésienne qui interdira toute forme possible de ''régulation économique''. On nous parlera alors de ''justice sociale'' selon Giddens et Rawls en oubliant, à ses risques et périls, que nous sommes des citoyens à part entière et non des sujets  burkéens à qui même l'éducation publique, chère à Condorcet, devra désormais être monnayée au-delà d'une neuvième année (v. Braverman). La ''banlieue'' tout comme sa République n'ont que faire de ces prétentions nietzschéennes sans grands fondements culturels.

 

2) Avec le PCE, les pouvoirs régaliens de l'Etat qui sont exercés par les représentants démocratiquement élus du peuple, flanqués par une technocratie publique recrutée au mérite et soumise à la surveillance de Parlements démocratiquement élus, sont destinés à être remplacés par la ''gouvernance'' privée. Ce barbarisme très en vogue aujourd'hui se réfère simplement aux instances décisionnelles ainsi qu'aux bureaucraties privées à l'emploi des grandes firmes et des banques capitalistes d'envergure internationale. On veut ainsi nous faire entrer dans un monde néo-féodal capitaliste (le capitalisme censitaire anglais d'origine en fait, mais sur une échelle globale) où les Nations feront place à une nouvelle domesticité et à un nouvel esclavage. Les élites des Nations anglo-saxonnes pour leur part auront l'avantage sur toutes les autres de disposer du même langage ainsi que de référents historiques, voire impériaux, communs.

 

3) S'il est entériné, le PCE représentera une étape incontournable dans l'établissement du fédéralisme censitaire et supranational. L'Ile-de-France vaudra ce que vaut la Bourgogne sur les grandes routes commerciales des foires moyenâgeuses post-modernes! Surtout, les citoyens des pays membres, trompés malgré eux par les fossoyeurs de la France et des Etats-Nations européens, ne recouvreront pas au niveau européen la souveraineté démocratique déléguée contre leur volonté réelle à des instances européennes totalement censitaires et soumises, pieds et poings liés, au principe de la concurrence non faussée. Des instances, de surcroît,  fédérales dont le but est d'émietter les peuples souverains existants en détruisant leur force citoyenne. L'initiative référendaire permise par le PCE dont certains vantent la valeur démocratique n'est qu'une forme de pétition sans valeur si ce n'est celle que la Commission voudra bien lui octroyer sans avoir véritablement à répondre de ses choix. Il eut été préférable de reconnaître tout de go un droit de veto et de retrait à tous les Etats membres tout en compensant cette assurance donnée à la souveraineté ultime des Etats-nations par une représentation proportionnelle des populations au sein d'un Parlement de Strasbourg qui commencerait ainsi à jouer son rôle véritable. Il ne s'agirait pas seulement de contenter les fédéralistes allemands ou d'ailleurs, mais surtout de faire émerger par l'entremise des partis européens  forcément transnationaux, une conscience citoyenne proprement européenne, compatible avec la souveraineté de chaque Etats-Nation membre et la solidarité de tous les citoyens. Nous aurions là le meilleur moyen de soutenir l'Europe sociale tout en créant simultanément des cercles concentriques pouvant aisément se chevaucher car leur but serait de maximiser les stratégies industrielles des Etats membres et de l'Union.

 

4) Le Traité de Maastricht nous parlait déjà de ''concurrence'', il est vrai. Mais il ajoutait également: ''L'Union prendra en compte l'identité nationale de ses Etats membres (...), et respectera les droits et les libertés tels qu'ils résultaient des traditions constitutionnelles des membres''. On ne pouvait être plus clair puisque le Traité prenait soin de remplacer la version fédéraliste initiale en faveur d'une ''union avec un but fédéral'' par ''une union sans cesse plus étroite'' (art. F, 3, 3b). Ceci permettait de définir la ''subsidiarité'' de manière à laisser les ''pouvoirs résiduels'' (non attribués spécifiquement comme pouvoirs exclusifs ou partagés aux différents paliers de gouvernement) dans les mains des Etats-nations. A part le respect des Critères et des quelque 300 directives qui leur étaient attachées, ceux-ci pouvaient donc décider en toute connaissance de cause de déléguer leur souveraineté au niveau européen ou pas. Maastricht visait l'établissement de l'Euro comme monnaie de réserve, permettant de la sorte de préserver l'Europe de l'abus des privilèges de seigneuriage monopolisés par le dollar. C'est à cela que servent les Critères de Maastricht. A strictement parler, Maastricht n'est pas responsable du détricottement de la stratégie industrielle menée avec brio durant les deux premières années du premier mandat du Président Mitterrand, quoique les notables mitterrandistes qui choisirent de plier face à la contre-révolution monétariste volckériene-reaganienne tentèrent par la suite de justifier leur capitulation socio-économique par l'instrumentalisation idéologique et politique du traité de Maastricht. De ce point de vue, la droite qui se livra aux privatisations et déréglementations durant les cohabitations trouvait le terrain idéologique tout préparé.

 

En ce qui concerne l'euro,  Maastricht fut une très grande réussite qui met la France ainsi que les autres membres de la Zone Euro à l'abri d'attaques spéculatives ciblées contre un seul pays. L'euro ne permet plus de ''dévaluation compétitive'' à la carte et c'est tant mieux, car il est temps de remiser le paradigme néolibéral monétariste, et ses ''mythes soréliens'' de supposés de gauche, pour en revenir à l'économie réelle et à la fiscalité républicaine progressive. (Ajout: Je n'avais pas soupçonné la lâcheté doublée d'une complicité idéologique active des actuels dirigeants européens jouant le jeu grotesque des CDS sur la dette souveraine pour mieux mettre les Etats membres sous tutelle des quelques banques privées new-yorkaises contrôlant la Fed et le FMI, à l'instar de ce qui se fit, jusqu'à peu, pour l'Amérique latine avec les Chicago Boys suivis par le Consensus de Washington! Parmi ces serviteurs volontaires particulièrement à Berlin et à Paris certains, d'ailleurs très va-t-en-guerre partout ailleurs, s'illusionnent de pourvoir jouer le jeu à leur propre profit pour coloniser le reste de l'Europe à l'instar de l'Allemagne de l'Est avec leur soi-disant "champions nationaux" privés et très globalisés, mais font servilement leur kowtow à répétition devant trois vulgaires agences de notation sionistes-yankees qui opèrent avec des critères purement subjectifs au seul profit des quelques banques mentionnées plus haut et de leur secteur spéculatif. Le tout est d'un pathétisme sans avenir, mais néanmoins économiquement très coûteux en plus d'être républicainement déshonorant. Les socialistes parmi ces dirigeants s'illusionnent-ils comme le pathétique Léon Blum appartenir "à la race de Herder" ensuite déménagée outre-Atlantique dans sa version rabbinique? J'ai bien peur que oui, ce qui doit beaucoup amuser Herder ... tout en attristant quelques contemporains qui se souviennent des tenants et aboutissants de la dernière Guerre Mondiale. Mais, à ce compte-là,  à quoi servait-il de faire l'euro?)  

 

C'est d'ailleurs cette étape qui devait faire l'objet du PCE. Autrement dit, il fallait compléter l'édifice monétaire de Maastricht par l'institutionnalisation d'une coordination et d'une planification économique digne de l'Europe. Or, cette coordination et cette planification économique iraient dans le sens contraire de la concurrence non faussée. Ergo, avec le PCE actuel, il faudra se contenter des ''coopérations renforcées''. Même M. Édouard Balladur semble avoir compris que cela ne suffisait pas. (voir ''Une nouvelle méthode pour l'Europe'' in www.lemonde.fr, 08-12-2004. Voir aussi mon ''Europe des Nations, Europe sociale et constitution'' ainsi que ''A constitutional coup in Europe'' in http://lacommune1871.tripod.com,  Section ''Economie politique internationale'') M. Balladur propose d'ajouter des ''coopérations spécialisées'', ce qui revient à dire: passons outre au projet constitutionnel lorsqu'il ne nous convient pas mais signons-le de toute façon! Malheureusement pour M. Balladur comme pour nous tous, passer outre à une constitution n'est guère aussi aisé que de passer outre à un simple traité comme le traité de Maastricht ou le Pacte de stabilité. Tout d'abord, passer outre ne veut pas simplement dire trouver un moyen de se soustraire aux lourdes ''procédures'' constitutionnelles relatives aux coopérations renforcées. Car il ne s'agit pas ici de ''procédure'' mais de ''droit'' du capital néolibéral. L'alternative de M. Balladur exigerait une modification constitutionnelle qui devrait donc être agréée à l'unanimité de tous les membres. En clair, une renégociation!! Si cette alternative cherchait à se matérialiser de manière ad hoc dans le cadre du PCE actuel, elle serait forcément combattue par l'Antitrust européen. Avec le PCE l'Antitrust, déjà débilitant, pourra s'appuyer sur un ''mind set'' commun à toute l'élite néolibérale, mais surtout sur la constitutionnalisation de la ''concurrence non faussée'' ! En outre, imaginons que ces coopérations spéciales aillent néanmoins de l'avant: elles ne seraient valables économiquement que dans la mesure où le marché européen permettrait de rentabiliser la recherche et le développement, ainsi que la production des ''produits complexes'' types Airbus qui seront visés. Ceci afin d'être en mesure d'atteindre des économies d'échelle suffisantes, donc de défendre ses positions au niveau mondial. Aller de l'avant à la carte sans pouvoir compter sur le marché européen est un contresens impérial-nietzschéen, en tout cas en ce qui concerne l'intégration européenne. Celle-ci visait la mise en place préalable d'un bloc économique et monétaire autonome sur le plan mondial. Cet édifice devant ensuite être  complété par une architecture politique centrale forcément confédérale permettant à l'Europe de parler d'une seule voie dans certains dossiers (cette architecture politique laissant bien entendu aux Etats-Nations la possibilité d'exercer leur veto ou de se retirer de programmes communs lorsqu'ils jugeraient que ces programmes ne correspondent plus à leurs besoins. ). Or, le PCE veut nous faire passer à une étape politique purement fédérale et censitaire, tout en déconstruisant l'unité et la coordination économique déjà atteintes qui sont pourtant nécessaires à l'autonomie économique de l'Europe tout comme à la mise en place d'une Europe sociale. C'est un comble. Sans vouloir trop insister, nous aimerions que les analystes ne cloisonnent pas les deux aspects: car à quoi bon des ''noyaux durs'' pour le Medef si les employés des membres du Medef doivent retourner à une démocratie bourgeoise censitaire, non seulement pré-Keynes mais également pré-Adam Smith?

 

Y a-t-il une différence entre ''coopérations renforcées'' et ''veto national plus retrait'' tel que je le préconise? La seconde option seule permettrait de faire progresser l'Europe vers le haut (les cercles à géométries variables pouvant se chevaucher) sans nuire à la cohésion de l'ensemble ni à la souveraineté ultime des Etats membres. Précisons que le droit de veto relève de la souveraineté inaliénable des Etats membres, donc de leurs peuples. Conjugué avec le droit de retrait, ce droit de veto reste une protection à tout épreuve pour les Etats qui voudrait l'exercer sans pourtant paralyser la marche des autres Etats. Le reste est affaire d'émulation socio-économique et culturelle, du moins tant que la démo-cratie prévaut, mieux qu'elle soit complétée en ajoutant à la démocratie représentative, la démocratie participative (y compris l'égalité au niveau des communications de masse) ainsi que la démocratie économique et industrielle.  

 

Pour comprendre la différence entre l'approche des coopérations renforcées et celle que je propose, il faut revenir sur deux éléments capitaux. Le premier concerne le principe de ''subsidiarité'' qui découle du PCE. C'est une révision dangereuse de l'énoncé du même principe présent dans les traités antérieurs, dont Maastricht (v. plus haut). Le deuxième élément concerne la fonction réelle de l'Antitrust, donc de la dynamique économique et politique dominante mise en branle par le PCE.

 

La subsidiarité est un principe inoffensif tant qu'il reste subordonné à une optique confédérale préservant en permanence la souveraineté ultime des Etats-nations membres. Cela devient un principe pernicieux dans une optique fédéraliste, surtout lorsque celle-ci n'ose pas dire son vrai nom. Malgré le langage alambiqué, les compétences résiduelles mais également les compétences partagées sont en réalité dévolues à l'Union lorsque celle-ci décide de s'en saisir. Il suffit de lire ensemble les articles 1-9, 1-9-2, 1-9-3 et 1-9-4 (concernant le principe de proportionnalité) mais également les articles 1-11- 2, 1-11-2, 1-11-5, 1-12 et 1-13-3. Cette dernière série ajoute l'économie et l'emploi, les traités internationaux, et les développements technologiques! Bien entendu, l'action de l'Union se justifierait par le bien commun mais elle laisserait intact les compétences des membres, en apparence. Car il suffira à l'Union d'envahir les champs de compétence puis de mettre les Etats membres face au fait accompli. Libres à eux alors de dédoubler les coûts! C'est ce genre de ''coup constitutionnel'' qui envenime sans relâche le fédéralisme canadien depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale! Le seul garde-fou restant concerne la procédure de décision politique ultime (à la majorité pondérée ou à l'unanimité) par le Conseil européen. Au risque de me répéter le ''degré de liberté'' du Conseil européen, point central de la pensée constitutionnelle de M. Giscard d'Estaing selon moi, sera fortement contraint par le principe de la concurrence non faussée, ainsi que par toutes les contraintes exogènes ( traités internationaux du même tonneau) et endogènes (développement technologique nécessitant des coopérations supranationales.) En matière de droits sociaux, à part la Charte de Nice qui ne contient pas le droit au travail ni les droits républicains liés à lui, cette action sera d'ailleurs soumise à la règle de l'unanimité. En clair, le Conseil européen pourra librement exercer ses pouvoirs chaque fois que cela servira le capital global, européen ou étranger, mais jamais lorsque cela pourrait servir les travailleurs ou les peuples puisque, à part le veto attendu des gouvernements conservateurs, particulièrement du gouvernement anglais en la matière, tout le domaine de l'économie et de l'emploi est strictement déterminé par la Partie III, et par conséquent par le principe de concurrence non faussée auquel le Conseil européen lui-même est soumis constitutionnellement. Ces précisions devraient mettre un terme à la confusion sinon au débat. De son point de vue ouvertement fédéraliste, le militant Vert M. Yann Moulier Boutang n'a pas tort d'applaudir la formulation fédéraliste et anti-nationale du principe de subsidiarité donnée par le PCE (voir, son article exposant ses trois raisons de voter oui au référendum dans http://multitudes.samizdat.net/article.php3?id_article=1742  ). Chez les Verts, il y a belle lurette que la localisation selon l'économiste anglais Marshall a remplacé l'analyse économique marxiste. Lipietz nous dira peut-être un jour comment concilier ''développement durable'' et ''technopoles'' avec la concurrence non faussée, sans doute avec l'aide de Cohn-Bendit, voire du post-illuminé Habermas!

 

A toute fin pratique donc le PCE définit la ''subsidiarité'' de manière à laisser les pouvoirs résiduels ainsi que l'initiative communautaire dans les domaines partagés au palier central (ou tous les Etats membres ne seront d'ailleurs plus représentés) plutôt qu'aux Etats-Nations membres conçus comme sujets souverains, ce qui était encore le cas avec le Traité de Maastricht. On ne s'étonnera pas que M. Jean Pierre Chevènement ait alors jugé utile dans son livre  Défis républicains de rappeler la genèse historique du concept de subsidiarité!

 

Une telle subsidiarité fédéraliste mène fatalement à un fédéralisme censitaire. Un tel système s'est avéré très dangereux pour tous les fédéralismes connus. Ce sera encore pire pour l'Europe puisque les dynamiques d'un tel fédéralisme reposeront sur un principe constitutionnel central a-scientifique autant qu'anti-démocratique, celui de la ''concurrence non faussée''. J'en veux pour preuve le préambule de l'article 91 de la constitution canadienne de 1867 qui alla dans le même sens, sous la supervision du Foreign Office (dont on constate que la mémoire institutionnelle impériale n'a pas faibli). Résultat? Un fédéralisme canadien en crise permanente, peu capable de s'adapter en douceur. D'abord, les technologies telles l'aéronautique, la radio et la télévision, qui n'existaient pas lors de la rédaction initiale de la constitution, furent accaparées par le fédéral ainsi que tous les bénéfices économiques qui en découlaient. Les provinces n'occupant plus que la place qu'on veut bien leur rétrocéder. Les traités internationaux furent utilisés également pour renforcer la main du palier central. Ensuite, les impôts sur le revenu, quasiment inexistants en 1867, continuent encore aujourd'hui à faire l'objet de crises permanentes, tant du point de vue du partage fiscal entre les provinces et le fédéral que du point de vue du calcul de la formule de péréquation destinée à permettre aux provinces les moins nanties d'offrir les mêmes services sociaux de base que les provinces plus riches.

 

Les fédéralistes croisés pensent couper l'herbe sous les pieds des Etats-Nations. Les Nations existaient avant eux, elles continueront d'exister sans eux. Cependant, l'Europe ainsi hâtivement conçue entrera en crise permanente dès l'adoption du PCE. Or, cette crise sera encore alimentée par la soumission de toutes les dynamiques décisionnelles centrales ou locales à la concurrence globale non faussée, c'est-à-dire à la domination du capital spéculatif global à court terme. Force est de conclure que certains veulent  accoucher à dessein d'une Europe mutilée. Et que d'autres restent sourds et aveugles face au danger.

 

En second lieu, il convient de comprendre la dynamique constitutionnelle de l'Antitrust eu égard de toute velléité de stratégie industrielle future. (Ajout: Pour vérifier voyez le sort de la Golden share en Italie, ainsi que la désindustrialisation stratégique d'une Péninsule dont quelque 90 % des entreprises emploient désormais moins de 10 ouvriers, la plupart précaires, barbarement voués à un âge de retraite reporté à 70 ans mais sans les cotisations nécessaires, vu la précarité et le chômage chronique chez les plus de 54 ans ...) La version moderne du Sherman Act américain naquit dans la tentative des New Dealers de délégitimer les dirigeants d'entreprise les plus Hooveriens tout en permettant aux firmes multinationales, saluées par Means et Berle dès le début des années vingt, de se renforcer sans se nuire mutuellement. L'Antitrust européen n'a pas du tout ce rôle de simple légitimation politique. C'est, à proprement parler, un ''chien de garde'' nietzschéen dont on se passerait aisément vu les antécédents. De fait, avec la constitutionnalisation de la concurrence non faussée, il constitue l'outil par excellence que les fédéralistes impériaux nietzschéens se sont forgés pour donner le coup de grâce à tout pouvoir régalien résiduel détenu par les Etats-membres, plus encore qu'au modèle rhénan dont même M. Michel Albert constate l'abandon (empressons-nous d'ajouter par les classes dominantes.) C'est toute l'idée du couple franco-allemand et des cercles concentriques de M. Delors qui est ainsi définitivement remise en question. L'illusion idéologique d'une disparition soudaine de la contradiction entre travail et capital, consécutive à l'écroulement de l'ex-URSS, aveugle bien des gens autrement plus perspicaces.

 

Les dirigeants actuels allemands et français eux-mêmes ne semblent pas l'avoir compris. A l'instar de M. Édouard Balladur, ils pensent pouvoir passer outre le moment venu, alors que la constitution ne pourra être modifiée que par l'unanimité de tous ses Etats membres! La seule chose qui se fera aisément semble-t-il c'est l'élargissement sans rime ni raison. En effet, pourquoi penser que les fédéralistes impériaux nietzschéens, qui ont préalablement sacrifiés, sans aucun problème de conscience particulier, les services et les entreprises publics de leur propre pays, les offriraient-ils sur un plateau d'argent au capitalisme oligopolistique du couple franco-allemand? Leur projet, signalé sans détour par la soumission à l'Otan décrété par le PCE, n'est rien d'autre que la soumission à l'Empire global dirigé par la ''gouvernance'' privée à dominance américaine, celle-ci devant être protégée du point de vue militaire par le Pentagone, et du point de vue idéologique par les bas-clergés d'un holocauste ''singulièrement'' défini sans grand respect pour les autres victimes du nazifascisme ou pour la contribution des communistes et de la Résistance à la défaite du Reich ainsi que de ses associés d'alors. Sous-traitance économique, politique, culturelle et militaire, voilà l'ambition des fédéralistes européens que l'on a vus jadis traverser l'Atlantique avec empressement pour négocier l' ''aide'' du plan Marshall avec Baruch! L'Antitrust appuyé constitutionnellement sera leur carte maîtresse. Il ne s'agit d'ailleurs pas de vaines supputassions. L'expérience récente parle d'elle-même quoi que les dirigeants allemands, français et autres n'en aient pas encore pris la mesure exacte. (Il fut un temps post de Gaulle où un amiral comme Sanguinetti rappelait que la question de l'autonomie de la défense mettait en cause l'autonomie du complexe militaro-industriel, donc une grande partie de la R&D, de surcroît soustraite, au nom de la sécurité nationale, du calcul des subventions directes par les Etats-Unis).

 

Cette Europe fédéraliste censitaire est le pur produit des franc-maçonneries post-illuminées européennes qui appliquent à la lettre les voeux des croisés chrétiens et autres, tels qu'ils furent définis dans les documents secrets du Pentagone et du Département d'Etat divulgués à la suite de la première guerre du Golfe. Ces documents furent rédigés par les mêmes équipes Wolfowitz, Rumsfeld et al qui aujourd'hui mènent leur guerre impériale préventive dans les Balkans, au Moyen-Orient et en Asie Centrale en vue d'empêcher l'émergence de ''tous rivaux potentiels'' de l'Empire. L'Europe n'est pas le rival potentiel dont on craint moins l'émergence autonome!

 

La valeur européenne d'une intégration propulsée par le couple franco-allemand reposait sur une vision toute contraire. Une vision démocratique, permettant de recomposer au niveau européen mais dans le respect de tous les Etats membres, les services ainsi que les entreprises publiques capables de conserver leur rang au niveau mondial et simultanément d'offrir aux Européens une véritable Europe sociale digne de citoyens de plein droit. Le PCE détruit la base économique du couple franco-allemand et nous mène fatalement à une logique antérieure même à celle de la CECA. C'est inadmissible

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5) On entend beaucoup de chose sur l'harmonisation fiscale. La peur très justifiée des délocalisations et de la désindustrialisation explique cette emphase. A mon avis, on en parle souvent très mal à propos. Certains soutiennent qu'il ne peut y avoir d'harmonisation fiscale qu'à la baisse. C'est la suite logique de l'idéologie néoconservatrice du désarmement fiscal (flat-tax ideology), une optique qui ne conçoit plus que les besoins du capital privé, et encore de manière primitive et très atomisée. L'intervention de l'Etat, par exemple grâce à la canalisation de l'épargne nationale en investissements productifs selon les orientations fournies par la planification indicative et incitative, est remplacée par une intervention étatique lourde qui croit cependant pouvoir dissimulée son action parce qu'elle remplace les interventions directes justifiables selon des critères sociaux (ou si l'on préfère des critères d'économie non-marchande) par des exonérations fiscales ciblées en faveur du capital privé. D'autres, moins naïfs reconnaissent la différence du pouvoir d'achat entre les pays membres de l'UE. C'est un progrès mais cela ne semble plus suffisant dans les conditions actuelles. En effet, tous refusent de voir que cette fiscalité aussi ciblée que régressive connaît déjà des rendements décroissants et qu'elle est parfaitement inutile pour lutter contre les délocalisations ou la désindustrialisation. Que faut-il à la place? Il faudrait commencer par reconnaître que la définition restrictive de la ''délocalisation'' n'est qu'un artifice statistique qui dissimule une dynamique très grave dont les effets s'accélèrent. Il faudrait ensuite reconnaître que l'on ne peut pas parler de délocalisation en abstraction des cycles du capital. Ceux-ci sont désormais globalisés tout en étant soumis à la domination du capital financier spéculatif à court terme. Le capital productif internationalisé des années soixante-et-dix n'échappe pas à cette domination. Dans ces circonstances, parler de délocalisation sans parler de désindustrialisation devient un oubli impardonnable ou une fraude intellectuelle autant que politique. Or, du fait de la tertiarisation croissante des économies modernes,  ''désindustrialisation'' doit être pris au sens large d'externalisation économique complète incluant désormais les biens traditionnels ainsi que les services haut-de-gamme. La Chine et l'Inde diplôment désormais plus d'ingénieurs que les USA; en outre ces pays disposent simultanément de basins de main-d'oeuvre bon marché quasi inépuisables ainsi que d'un marché intérieur solvable en croissance continue.

 

Pour reprendre la main sur ces cycles du capital global tout en assurant une insertion gagnante au sein de l'économie mondiale capitaliste, les pseudo-barrières invisibles tels le principe de précaution ou le principe d'exception culturelle ne mèneront pas loin. L'Accord de Kyoto aidera un peu les Etats plus courageux. Quand aux protections syndicales, elles sont battues en brèche par les gouvernements néolibéraux qui craignent leur propre prolétariat plus que les bourgeoisies étrangères! Toutes ces réglementations nouvelles ne sont pas inutiles. Bien au contraire. Mais elles sont minées de l'intérieur par une logique marchande à l'emporte- pièce qui prétendrait aller jusqu'à breveter le vivant et à soumettre les banques de données visuelles au droit d'auteur et aux brevets privés. Ce sont malheureusement là des tendances contre lesquelles nombre de savants et de créateurs ont baissé les bras.

 

Il faut redevenir sérieux et avoir l'audace d'aller à l'essentiel sous de nouvelles formes. A moyen terme, il faudra songer à établir de véritables Fonds Ouvriers contrôlés par les syndicats et donc gérés en fonction de besoins sociaux soustraits, par définition, à la logique purement marchande ainsi qu'à l'ingérence de l'OMC (voire de Bruxelles!). Ces Fonds permettraient de reprendre le contrôle des entreprises nationales, en particulier dans les secteurs publics; ils pourraient fournir l'assise financière autonome nécessaire pour recapitaliser ou restructurer ces entreprises afin qu'elles demeurent en pointe technologiquement autant que socialement. Entre-temps, il conviendrait de préparer une contre-offensive au niveau de l'OMC (les négociations du  Gats en fourniraient un prétexte tout désigné) pour faire entériner une nouvelle règle anti-dumping liée au plein-emploi dans les secteurs décrétés être d'importance stratégique par les Etats ou les blocs commerciaux. (Ce ne serait finalement qu'une généralisation intelligente de l'ex-Amendement Byrd dont l'unilatéralisme s'exerçait contre les concurrents commerciaux sans avertissement, dans la pure lignée des Lois 301 et Super 301 conférant des pouvoirs commerciaux unilatéraux au Président des USA, capables de désorganiser la concurrence de manière importante, malgré ce peut en dire avec retard l'OMC une fois saisie des dossiers! ). Soulignons, en outre, qu'au sein de  la zone de libre-échange nord-américaine des lois spécifiques fixent des seuils minimums de contrôle national à respecter au sein des secteurs économiques.

 

Mais l'Europe doit aller plus loin pour respecter et faire respecter son modèle social. Pour cela elle ne pourra pas faire l'économie de l'élaboration ni de la constitutionnalisation d'un principe d'harmonisation fiscale flexible, capable de différencier entre le capital à long terme immobilisé dans les entreprises productives et le capital spéculatif à court terme. Ce dernier jouit d'une vélocité électronique qui permet de capitaliser sur les différentiels offerts par les changes flottants en rendant ceux-ci instables en permanence, contrairement à ce qu'avaient prévu les gourous monétaristes de premiers ou de second ordre! Cette distinction n'impliquerait pas nécessairement une baisse mais bien une hausse pour le capital spéculatif. Ceci diffère grandement de l'approche proposée par les tenants de la Taxe Tobin (mythe sorélien par excellence!) puisque celle-ci ne fait justement pas la distinction entre les différents capitaux et leurs cycles spécifiques. Les ''Seuils Tobin'' décrits dans Tous ensemble parachèveraient l'édifice. La modulation des ratios Cooke  au sein de chaque Etat membre dans le respect des Critères de Maastricht, tout en tenant compte de la solvabilité des intermédiaires financiers impliqués, iraient dans ce sens. Une banque d'investissement européenne avec des succursales nationales autonomes suffisamment dotées pourrait alors opérer selon une logique contre-cyclique et moduler ses propres ratios Cooke afin d'optimiser son action. Dans la mesure où son action serait spécifiquement liée à l'investissement productif, elle serait bénéfique du point de vue de l'inflation. Bien entendu, cette harmonisation fiscale flexible tiendrait compte du pouvoir d'achat dans chaque pays membre, mais sur la base de cette distinction préalable. Il serait alors possible d'aller de l'avant très rapidement. Cette harmonisation acquerrait toute sa valeur si elle s'appuyait sur  une nouvelle politique anti-dumping liée au plein-emploi qui serait défendue par le Commissaire au commerce de l'Union, dont le rôle n'est certes pas de sacrifier les travailleurs et les citoyens européens au capital financier spéculatif et apatride global

 

Paul De Marco, Copyright © 12 décembre 2004.                  

 

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