LES CONSEQUENCES SOCIO-ECONOMIQUES DE MM. VOLCKER, REAGAN ET Cie. (IV)
UNE PORTEE DE CROCHES.
En pratique les sentiers du monétarisme sont bien plus escarpés
qu'en théorie. Si l'on compte sur l'anthropométrie fiscale et sur
les dépenses militaires pour assurer la croissance, on se rend vite
compte que la seule chose à enfler est la dette publique ... qui
devra bien un jour être combattue de front et non par escarmouches
comme on s'apprête à le faire. On ne saurait, même à Washington,
tout sacrifier indéfiniment au nom du salut des banques commerciales
et de la restructuration industrielle.
L'échéance, inéluctablement, pointe le bout de l'oreille.
Il est cependant exclu que l'on puisse éponger la dette par des
gains à l'exportation même en acceptant, comme l'Administration
Reagan le fait maintenant, une croissance industrielle ralentie et
en baissant quelque peu les taux d'intérêt - et la valeur du dollar.
Le déficit de la balance commerciale en 1984 atteignait $123,3
milliards et l'on estime déjà qu'il sera d'au moins $140 milliards
en 1985.(1)
En effet, les entreprises les plus productives sont, à toute
fin pratique, multinationalisées et pour cette raison exportent
somme toute peu, préférant produire à l'extérieur. De plus, nombre
de pays importateurs de biens américains se retrouvent plus endettés
que jamais et nombreux sont ceux qui ne peuvent plus payer leurs
importations les plus essentielles qu'en s'en remettant à des
avances à court terme du FMI, qui continue cependant à leur imposer
des conditions draconiennes et à refuser d'accroître
substantiellement les droits de tirages. Pire, la baisse du dollar
et la contraction du marché américain amorcées en février, vont
annuler les gains de ces pays à l'exportation. Reste l'exportation
des produits agricoles, des produits à fort contenu technologique et
de ces produits nouveaux (ex. l'information) et dont les gros
acheteurs mais aussi les gros concurrents sont les autres pays de
l'OCDE et dans une certaine mesure les nouveaux pays industrialisés
du bassin pacifique vers qui le commerce américain s'est tourné dès
1977.
Il est à cet égard utile de rappeler que si les USA
n'importaient que 8% de leurs machines outil en 1970, ce pourcentage
passa à 20% en 83 et 24% en 84.(2)
Il n'y a donc pas l'ombre d'une solution au dilemme, sauf
illusoirement en se lançant dans une course en avant et en tentant
de passer le relais pour un temps aux autres pays de l'OCDE. En
conséquence, nous serions condamnés jusqu'à nouvel ordre à la valse
cadencée des taux d'intérêt Volckeriens: depuis la fin février, une
tentative de baisse en se croisant le majeur sur l'indexe en signe
propitiatoire, en espérant qu'un calme relatif s'établira; puis l'or
atteindra des niveaux jugés intolérables ( entre $500-600? )
réanimant la tempête et de nouveau Volcker cherchera la quiétude -
ou le vertige - en essayant d'atteindre l'œil du cyclone. Le
scénario s'annonce houleux et rien ne laisse croire que M.. Volcker
abjurera ses prédilections monétaristes, ni que M. Reagan
n'abandonne la "guerre des étoiles" à des cinéastes de deuxième
classe. Dans ces conditions la guerre de la dette aura-t-elle lieu?
Fin février, début mars: une portée de croches inattendue stria
l'air serin des lunes de miel post-électorales. Un réajustement
s'imposait mais synchronisé, à la manière du maître de cérémonie M.
Volcker. Tentons d'en retrouver la structure au fil de
l'anecdotique.
Le 20 février 85, Mme Thatcher, en tant que grande admiratrice
du Président Reagan, se charge de lui rappeler du bout des lèvres
que la forte ascension du $ américain, par les pressions qu'elle
exerce sur les économies européennes, pourrait conduire au
protectionnisme.(3) La Dame de Fer serait-elle devenue Cassandre ou
un Dr. Schacht en herbe? Tout au plus un zélé Hermès dans l'Olympe
monétariste. Aussi, le 25 février, M. Volcker mentionne la dette
américaine, mais sotto voce; le 26 février le $ Cnd arrête
momentanément sa chute. Le mercredi 27 février, jour clé de
l'épisode, les banques centrales des pays de l'OCDE interviennent
massivement et de concert pour soutenir leur monnaie respective,
tandis que la Réserve Fédérale oblige, en modérant ses activités:
elles dépensent ainsi près de $2 milliards en un seul jour; la
Bundesbank à elle seule dépense ce jour-là près d'un demi-milliard,
en intervenant sur les marchés du Moyen Orient et celui de
Francfort.(4) Ce même jour, M. Volcker informait le Congrès que
l'intervention des banques centrales étaient trop faible pour
influencer efficacement le cours des monnaies. M. Royer Kubarych, du
Conference Board américain et qui fut jusqu'en janvier l'économiste
en chef de la Réserve Fédérale, précise que puisque de $50 à $100
milliards sont transigés journellement sur les marchés boursiers,
pour être efficace l'intervention aurait du être non de $2 mais bien
de $10 milliards.(5) Douterait-on de la parole delphique de M.
Volcker? Le jeudi 28 février le $ Cnd perd 0.54 cent; le vendredi
1er mars, il abandonne encore 0.19 cent pour s'établir à 71,89 cents
à la fermeture. Heureusement, la Bourse fait relâche durant la fin
de semaine. L'épisode, cependant révèle de manière éclatante la
faiblesse structurelle des banques centrales face à la Réserve
Fédérale, conséquence imprévue du système de Bretton Woods.
Mais M. Volcker a plus d'une flèche à son carquois: ce même
mercredi 27 février, il annonce une diminution progressive de
l'accroissement de la masse monétaire M1, mais il ajoute prudemment
que la décision de restreindre n'est pas encore prise. Les marchés
s'inquiètent néanmoins, les Bons du Trésor américains voient leur
valeur fléchir. La semaine suivante M. Volcker reprend son oeuvre de
façonnement de la psychologie des marchés; il les taquine pour
l'avoir, selon lui, mal interprété et ajoute paternel: "nous voulons
procurer suffisamment d'argent cette année pour soutenir une
croissance ordonnée de la demande et de l'output".(6) Aussi,
lorsqu'on apprend finalement que la masse monétaire M1 a augmenté de
$3,6 milliards ( c.à.d. un peu moins que prévu) l'augmentation
s'avère suffisante pour conserver la confiance du monde des affaires
au beau fixe.(7) M. Volcker connaît bien son monde: la montée
fiévreuse du $ est freinée, les autres monnaies peuvent souffler et
le terrain pour un renversement de tendance est préparé en douceur.
Phénomène intéressant, quoiqu'à peine perceptible encore, mais
qu'il faudra surveiller, l'or qui reprend son ascension lentement le
fait d'une manière plus divergente selon les places financières:
irait-on vers plus d'autonomie pour les diverses banques centrales?
à quand un contrôle effectif de la masse monétaire M3?
Quoiqu'il en soit, ayant ainsi préparé le terrain, M. Volcker
peut désormais "s'attaquer" au gros morceau: le 4 mars, il admet que
le déficit américain doit être réduit mais par d'autres moyens que
des augmentations d'impôts. Dilemme, car en l'occurrence le
"Chairman" sort de son domaine propre pour entrer dans celui moins
accoutumé à la virtuosité: les relations entre le Président, la
Chambre des Représentants et le Sénat et le domaine de la politique
politicarde plus généralement. A titre d'exemple, si M. Volcker a sa
logique propre, il reste que le "vice-chairman" de la Réserve
Fédérale, Preston Martin, doit sa nomination à M. Reagan et qu'il
n'a pas craint de contredire son chef en déclarant que la masse
monétaire M1 devait s'accroître plus vite cette année.
Cependant M. Volcker a d'autres appuis; d'abord James A. Baker
III, le nouveau Secrétaire au Trésor: par sa bouche, la nouvelle
Administration Reagan admettait qu'il y a un lien entre la
surévaluation du $ et le déficit américain; ensuite, les
multinationales font entendre des récriminations: on ne saurait plus
longtemps, selon elles, favoriser en premier lieu les banques
commerciales, cela d'autant plus que les dettes ont été
rééchelonnées avec "succès" pour une décade; surtout les
agriculteurs, les producteurs de textiles, d'acier et d'autres
industries traditionnellement vulnérables aux importations de
l'étranger ou nécessitant un $ plus faible, - ou, malgré la
rhétorique néo-libérale, des subventions, pour pouvoir exporter,
sont en passe de se mobiliser. Là-dessus M. de Larosière joint sa
voix(8) à ce qui risque de devenir un hallali général si on n'y
pourvoit.
Début mars le réalignement des forces se précisait: Reagan
opposa son veto à une mesure législative visant à créer un fonds
d'urgence pour les agriculteurs; les raisons reaganiennes? Cela
ajouterait au déficit! Le Comité du Budget du Sénat, prisant peu la
plaisanterie, répliqua en votant une coupure de $79 milliards des
dépenses militaires des trois prochaines années.(9) Echec! on
esquive et M. Reagan parvient, fin mars, à faire passer par le Sénat
et la Chambre des Représentants une nouvelle tranche de construction
de l'inutile missile MX: un point donc pour les sabreurs; échec pour
les sabreurs du déficit.
Mais pas encore mat car, nous dit-on, tout le monde est
maintenant d'accord pour réduire le déficit, les divergences ne
tenant qu'au moyen d'y parvenir!
Le nœud serait gordien même sans les complications politiques
et militaires. M. Leonard Silk résume ainsi: "sous la direction de
M. Volcker, la Réserve Fédérale semble s'être engagée dans une voie
monétaire visant à réduire graduellement le taux d'échange du dollar
qui inflige de lourds dommages à la compétitivité des industries
américaines importatrices et exportatrices et à l'agriculture et qui
accroît les pressions protectionnistes mettant en danger le commerce
mondial. Puisqu'un dollar en baisse ferait augmenter l'inflation et
le taux d'intérêt, la Réserve Fédérale est confrontée à un difficile
problème quant à la conduite de sa politique monétaire: car si elle
resserrait la masse monétaire pour parer à l'inflation qu'un dollar
en baisse provoquerait, cela ferait monter les taux d'intérêt. Le
danger c'est que la hausse des taux d'intérêt mette fin à la
croissance de l'économie américaine, intensifiant les problèmes de
remboursement des dettes du Tiers-Monde et plongeant l'économie
mondiale dans la récession".(10)
Et c'est bien pourquoi M. Volcker, qui aime jouer sur plusieurs
tableaux à la fois, choisit la course en avant: pour éviter la
"récession" il encourage à la réduction du déficit sans
accroissement des impôts; or, comme M. Reagan tient mordicus à ses
fantaisies étoilées, maître Volcker, en désespoir de cause,
s'apprête à passer le relais.
Le scénario le plus optimiste constate que le $ US s'est
apprécie de 9% depuis décembre 84: il s'agirait alors d'annuler
cette hausse progressivement tout en espérant que la reprise des
économies des autres pays de l'OCDE et de certains pays du Pacifique
sera suffisante pour attirer une partie des capitaux errants et pour
absorber une augmentation des exportations américaines, du moins
pour un temps. On contrôlerait ainsi, tant bien que mal, la
récession et la spéculation et pour cela Volcker serait prêt à
maintenir la croissance industrielle des USA à quelques 4% ( alors
qu'elle était de 7% l'an dernier ) tout en cherchant à réduire le
déficit de $50 milliards, afin de poser les bases d'une solution
plus viable à long terme. Espérances ingénieuses ou ingénues?
Car où sabrera-t-on? Tant que Reagan insiste pour se croire -
retour d'âge? - à l'écran d'un western étoilé, ce sont les dépenses
sociales qui continueront à pâtir quoiqu'elles n'aient déjà plus que
la peau sur les os: le rendement sera faible. Entre-temps la Maison
Blanche et le Congrès continueront à faire du troc sur le budget:
simples escarmouches contre la dette nationale. Serions-nous alors
réduit à attendre patiemment un éclaircissement des prochaines
élections? Peut-on seulement attendre jusque là?
Les gens au pouvoir ont coutume de présenter leurs choix
politiques et de société comme découlant de la nécessité objective
des choses: détracteurs vous vous êtes fourvoyés! Or, rien de
nécessaire ni d'objectif dans l'anthropométrie fiscale et dans les
nouvelles dépenses militaires; rien de nécessaire non plus dans la
restructuration discriminatoire actuelle de l'économie, ni dans le
diagnostique qui la motive; la seule nécessité à tout cela n'est que
la défense de certains intérêts au détriment d'autres possibles. La
véritable nécessité aujourd'hui est de penser des alternatives moins
onéreuses à l'ensemble de la société.
Le problème, en effet, réside moins dans la compétitivité
globale amoindrie des USA que dans son accroissement productif
extrême dans les secteurs de pointe. Cet accroissement de la
productivité, par définition destructeur d'emplois, a fait sauter le
système du "Welfare State" (Etat-Providence) mis en place par le New
Deal, et qui était axé fondamentalement sur trois piliers
interreliés: (1) la compensation du pouvoir des nouvelles firmes
géantes par des organisations syndicales bonna fide suffisamment
puissantes pour que le système de négociations collectives
institutionnalisé soit plus qu'une simple farce jaune, à quoi
s'ajoutent les appareils de sécurité sociale et scolaire ( écoles,
universités, centres de recherche); (2) l'abandon plus ou moins réel
de la théorie des budgets balancés annuellement, qui ravalait, par
analogie, l'Etat au rôle d'un individu aux principes tristement
victoriens, au profit d'une utilisation plus audacieuse des leviers
monétaires et fiscaux; (3) la poursuite de la croissance interne,
dans le cadre d'un multilatéralisme négocié ( FMI, BIRD, GATT etc).
Ce qui distingue la crise actuelle de celle des années 30,
c'est qu'elle naît de causes différentes; la crise des années 30 a
pu être caractérisée comme une crise de maturation/stagnation
( Hansen, Kalecki, Steidl, Sweezy etc ... ) en ce sens que les
innovations technologiques majeures étaient établies et que donc le
problème de la production étant résout, il suffisait de résoudre
celui de la consommation sociale, quitte à réviser quelques
préjugés. Pour ce qui est de la croissance, et bien que la guerre
froide en détourna substantiellement le sens vers le développement
du complexe militaire-industriel, elle pouvait donc être
essentiellement assurée par l'effet d'entraînement dû au
développement des secteurs intermédiaires - auto, électro-ménager,
construction etc ... ) qui, de fait, épongèrent d'abord l'épargne
forcée des ménages durant la guerre, puis une partie des salaires
plus décents obtenus grâce aux conventions collectives.
La crise actuelle, au contraire, tient à ce que les révolutions
technologiques introduites sans cesse dans la production ne semblent
pas trouver le soutien nécessaire dans la consommation sociale,
parce que les gouvernements ont choisi plutôt de détourner le modèle
vers un système de soutien en vase clos par les dépenses militaires.
Il est vrai que si les secteurs intermédiaires anciens n'ont
pas disparus, leur place et leur rôle d'entraînement dans l'économie
se sont considérablement amoindris; ce processus a commencé à la fin
des années 60, alors que l'introduction d'innovations techniques
débutait - témoin l'amorce de la baisse des salaires réels à la même
époque et les tentatives syndicales de négocier des clauses de
protection du pouvoir d'achat -. Il a connu une forte accélération
par la suite qui se poursuit encore aujourd'hui.
Le défi véritable serait donc simple: développer de nouveaux
secteurs intermédiaires capables de relancer la croissance sociale;
à défaut de cela le système ne peut survivre qu'en développant de
plus en plus ses mesures de contrôle plus ou moins avouées de la
population; un tel régime signalerait ainsi la nécessité de son
remplacement.
Or, les germes de ces nouveaux secteurs existent déjà dans les
industries de pointe - ordinateurs, biotechnologies etc ... - Si ces
secteurs étaient socialisés ou du moins conçus socialement, il
apparaîtrait alors que, loin de s'attaquer aux institutions
syndicales, sociales, universitaires et de recherches, loin de
vouloir imposer un multilatéralisme aussi hargneux qu'unilatéral, il
faudrait renégocier celui-ci et étendre celles-là; et, en tout
premier lieu, les institutions de la connaissance, qui dans le cadre
d'une journée de travail accourcie, d'une nécessité plus pressante
de recyclage réels et non de seconde classe et du rôle nouvellement
affirmé de la connaissance comme moyen de production, ont un rôle de
premier plan à jouer, auquel tout le monde a non seulement
l'obligation, mais aussi le droit, de participer, afin que l'issue
de la crise puisse enfin être envisagée - l'école primaire et
secondaire ne saurait suffire qu'à ceux qui rêvent encore de l'être
humain-gorille de F. Taylor. De même, le travail ménager devrait
être socialisé, lui qui contribue dans l'ombre l'équivalent d'un
tiers du PNB, gratis.(11) C'est pourtant tout le contraire qu'on
nous offre aujourd'hui.
L'objection principale ( abstraction faite de celles motivées
par les seuls préjugés) faite à cette manière de penser, est qu'une
telle stratégie en accroissant la valeur de la force de travail
réduirait à néant notre productivité sur le marché mondial et là-
dessus on brandit à nos yeux le spectre de ces ouvriers travaillant
pour des salaires de famine et sans syndicats gênants dans les pays
du Tiers-Monde et ceux nouvellement industrialisés. La nécessité
objective, encore, tombant sur nous comme la misère sur le monde.
Malheureusement, ce raisonnement n'est pas seulement
factuellement partiel, il est surtout logiquement bancal. Sa base
est une interprétation illégitime, ou du moins très risquée, de la
théorie de l'avantage comparatif du grand Ricardo: or, faut-il
rappeler que l'exemple original de Ricardo concernait la laine
manufacturée par l'Angleterre et le vin produit par le Portugal? on
jugera aisément des résultats d'échanges de ce type-là! L'économiste
allemand List comprit très vite qu'une stratégie nationale cohérente
n'allait pas contre l'esprit même de l'avantage comparatif
ricardien: elle en corrigeait seulement les effets pervers.
La cohérence de la reproduction économique ne doit donc pas
nécessairement être éparpillée au plan mondial, on peut choisir de
la renforcer sur le plan national. A titre d'illustration, rappelons
que le Québec s'est taillé une part enviable de l'exportation des
produits manufacturés canadiens parce que depuis la Révolution
Tranquille des tentatives furent faites pour restructurer l'économie
nationale: il est dommage que ce mouvement semble devoir être remis
en question et que des personnes comme M. Parizeau entonnent
maintenant le chant de la privatisation d'entreprise comme Hydro-
Québec. Rappelons aussi que les USA et l'OCDE en général ont, de
fait, augmenté les barrières qu'ils opposent à l'entrée des produits
manufacturés.
D'ailleurs, qu'on ne s'y trompe pas, le discours de la libre
concurrence internationale cache la réalité d'une restructuration
mondiale, sous l'hégémonie des USA, guidée par les intérêts privés
des banques et des secteurs de pointe: on privilégie la croissance
industrielle privée et militarisée au détriment d'une croissance
sociale plus large. C'est cette dernière que nous revendiquons.
REFERENCES
1) La tribune de l'économie, sam. 2, dim. 3 mars 1985
2) P.T. Kilborn, N.Y.T., March 3, 85
3) Le Devoir, 21 fév. 85
4) La tribune de l'économie, op. cité.
5) Cité par Kilborn, op. cité
6) Cité par Leonard Silk, N.Y.T. , March 2, 85
7) K.N. Gilpin, N.Y.T., March 8, 85
8) Le Monde Diplomatique, mars 85. Quoique Claude Julien semble
exagérer les différents qui existeraient supposément entre le
Directeur Général du FMI et le Chairman de la Fed.
9) Leonard Silk, N.Y.T., March 8, 85
10) idem
11) Louise Vandelac (sous la direction de), Du travail et de
l'amour: les dessous de la production domestique, éd. Saint-Martin,
1985.
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LES CONSEQUENCES SOCIO-ECONOMIQUES DE MM. VOLCKER, REAGAN ET Cie. (V)
DIVINA COMMEDIA: L'INFERNALE CROISSANCE NEGATIVE
Depuis 1945, les pays dits en voie de développement virent
surtout leur sous-développement augmenter. La dénonciation de cette
triste réalité cessa d'être le fait des seuls radicaux des 1964,
lorsque Raul Prebisch réussit avec l'aide des pays périphériques à
fonder UNCTAD dont il devint le premier Secrétaire Général. Sous son
inspiration, ces pays se regroupèrent dans ce qui sera désigné comme
"le Groupe des 77" et dénoncèrent les accords du GATT, moyen selon
eux, d'exploiter les pays moins nantis par le biais de l'inégalité
des termes des échanges. Ils apprirent très vite à dépasser cette
problématique; en un sens, le dialogue de sourds Nord-Sud et la
revendication d'un Nouvel Ordre Economique International,
confirmaient ce fait. Ces initiatives, si elles furent jamais prises
au sérieux par les pays nantis, sont aujourd'hui mises sous le
boisseau par les monétaristes au pouvoir.
Cette contre-initiative des pays nantis, sous la direction de
Washington, survient à un moment où le "Groupe des 77", au sein
duquel la solidarité fut toujours minimale, s'est définitivement
scindé. Les raisons de cette cassure sont à rechercher dans
l'environnement nouveau engendré:
(a) par l'impact des chocs pétroliers (73/79) sur les pays
périphériques non-producteurs d'or noir;
(b) par l'émergence de pays producteurs de pétrole mettant de
l'avant des intérêts propres et soucieux avant tout de recycler,
vers un Nord attrayant, leurs nouvelles richesses;
(c) par la montée de ceux qu'on appelle trop hâtivement les
"nouveaux pays industrialisés", tels la Corée du Sud, Singapour,
Taïwan, le Brésil ...
Reste que la faible cohésion défensive de la périphérie est
reléguée pour un temps au musée de l'histoire: par ses voix
disparates elle n'exprime plus qu'impuissance, quémandant à la
pièce, à l'heure où l'unité eut été une nécessité vitale. La
politique de MM. Volcker/Reagan, comme celles du FMI et du Groupe de
la Banque Mondiale (IBRD, Corporation Internationale de Financement
et Association Internationale de Développement ) qu'à toute fin
pratique Washington contrôle, s'empressa d'accentuer cette cassure
et d'en tirer parti. Dans la capitale américaine la priorité n'est
plus à la création de modèles de développement et de révolutions
vertes, mais bien à la résorption de la dette des pays périphériques
- et tout spécialement les Latino-américains - qui risquerait
autrement d'acculer les banques commerciales américaines à la
banqueroute, entraînant avec elles le système monétaire
international.
En août 82, l'alerte fut sonnée par le Mexique qui ne parvenait
plus à honorer ses traites sur une dette globale de plus de $ 81
milliards. Pour empêcher la banqueroute du pays et la réaction en
chaîne qu'elle ne manquerait pas de provoquer, les banques
américaines, sous l'égide du FMI, renflouèrent le gouvernement
mexicain, au coût d'une trentaine de milliards sous forme de
nouveaux prêts. Du même coup, s'institutionnalisait la tutelle du
FMI, et ce que l'on appelle prudemment aujourd'hui "le partenariat
avec le secteur privé".(1)
Les pays de la périphérie avaient depuis quelques années déjà
exigé une augmentation de 50 à 100% des quotas de $67 milliards du
FMI. Les USA s'y opposèrent, prétextant qu'une telle hausse
conduirait les pays endettés à négliger leurs dettes - chose,
semble-t-il, que seuls les USA peuvent se permettre avec impunité.
L'Administration reaganienne proposa au contraire une augmentation
de leurs propres quotas au FMI de 25% ( soit plus ou moins $8,4
milliards) qui ajoutés à l'augmentation des quotas des 146 autres
pays membres porteraient la hausse globale à $ 42 milliards.(2) De
plus, les USA proposaient la création d'un Fonds d'Urgence de $25
milliards. Chapeautant le tout, de Larosière, au nom du FMI, avait
promis d'exercer sa surveillance.
Parallèlement, cependant, le Département du Trésor américain
recommandait une coupure de 35 à 40% des contributions américaines à
l'Association Internationale de Développement dont il importe de
noter qu'elle constitue, en fait, la "soft loan window" du Groupe de
la Banque Mondiale. Ceci malgré le fait que selon une étude (en 82)
du Département du Trésor lui-même, on reconnaissait que les profits
des projets de la Banque Mondiale étaient excellents à 15-20%. Force
nous est alors de reconnaître le loup à son pelage: les 10 plus gros
emprunteurs à la Banque Mondiale sont aussi les dix plus gros
récipiendaires de l'aide bilatérale des USA, telles l'Inde,
l'Indonésie, les Philippines, la Turquie etc ...(3)
Force nous est de tirer les conclusions qui s'imposent: pour
assurer leurs positions stratégiques et économiques dominantes, les
USA ont choisi de soutenir à fond certains "nouveaux pays
industrialisés", de forcer ceux dont la dette menace à se lancer
dans des programmes d'assainissement, enfin, d'abandonner les autres
qui devront se contenter d'une aide internationale évanescente,
d'une aide humanitaire qui sauvera qui elle pourra et de plans
d'austérité pensés par des experts souvent surnuméraires du FMI et
de la Banque Mondiale.
Ces derniers pays, en effet, avec une dette dans un rapport de
1/1 avec leurs gains à l'exportation, mettent moins les banques
occidentales en danger que les pays latino-américains ( dont le
rapport est de 3.5/1 ). Les investissements indirects et les
multinationales y sont moins présents et s'y sentent moins menacés à
court terme. Leurs parts des importations/exportations américaines
sont aussi plus faibles.
La majorité de ces pays est africaine; on se souviendra que M.
Mitterrand déclara que l'Afrique risquait de devenir "le continent
perdu du développement"; il serait plus juste de dire qu'elle n'est
que le lieu de la démonstration brutale d'un développement pris à la
gorge par les carcans des conditions du FMI. A ce propos, M.
Mitterrand et ses collègues de la CEE devraient peut-être penser
d'urgence à réviser les accords entre la Communauté et les Etats
africains et à réviser aussi leurs positions dans les organisations
internationales.
Pour l'instant, en tout cas, les USA et le FMI ont su imposer
leurs priorités: les dettes principales sont rééchelonnées pour près
d'une décade et la tutelle du FMI est institutionnalisée; les pays
nantis et les banques peuvent souffler; aussi ne voit-on pas le New
York Time écrire: " cet accord, auquel s'ajoute une certaine
reprise économique dans les pays débiteurs, permet de penser que,
même si des problèmes risquent de subsister pendant quelques années,
le pire est déjà passé"; et d'ajouter avec une sage pudeur: "En ce
qui concerne les difficultés qui accompagnent cette dette, il est
certain que la situation est malheureusement différente"(4)
Dans ces conditions le rééchelonnement des dettes devient même
une affaire lucrative puisque les nouveaux prêts sont consentis à
des taux supérieurs de 1-1/4% au taux minimum consenti aux USA(5)
alors que de reprise économique, ma foi, on n'en voit guère.
Ce que l'on voit, par contre, dans les pays périphériques ( à
l'exception peut-être des "nouveaux pays industrialisés" qui restent
cependant très vulnérables du fait que leurs dettes sont élevées et
que leurs économies demeurent très susceptibles aux fluctuations des
importations américaines étant donné les créneaux productifs
occupés), ce que l'on voit, c'est le développement d'une catastrophe
sociale innommable et qu'un euphémisme barbare ose appeler
"croissance négative" puisque, malgré un PNB en baisse, les gains
aux exportations, destinés à éponger les dettes, augmentent.
Concrètement, qu'est-ce à dire? Le Brésil, par exemple, avait
connu dans les années 70, un taux de croissance de plus ou moins
10%: le "miracle brésilien" trop vite dénommé ainsi puisque
l'amélioration des conditions sociales de la population fut loin de
suivre au même rythme. A la même époque, on avait aussi pu croire un
"miracle mexicain" possible grâce aux revenus pétroliers;
aujourd'hui, cependant: "au Mexique, la croissance a été négative de
4,3% en 1983 et serait nulle pour 1984. Au Brésil, la croissance a
été négative (- 3,3%) en 1983 et serait légèrement positive en 1984,
tirée par le colossal déficit commercial américain".(6) Et dans ces
deux cas, il s'agit moins de rembourser les dettes que de prouver
qu'on peut le faire, renflouant ainsi la volatile et exigeante
"confiance" du monde des affaires.
Au dépens, bien sûr, des populations qui doivent subir dans
leurs chairs les conséquences des dévaluations massives, des
coupures de dépenses sociales déjà dérisoires, des restrictions à
l'importation de certains produits et des répressions féroces en cas
de jacqueries de la faim.
On saisira toute la gravité de la situation puisqu'en Amérique
Latine seuls deux pays, le Paraguay et la Colombie, parviennent,
tant bien que mal, à faire front à leurs obligations financières,
sinon humanitaires. Les autres, comme la Bolivie et l'Argentine,
sont poussés à la dérive; tout récemment, c'est la Bolivie qui
faisait les manchettes avec une grève générale des ouvriers et des
paysans tentant d'obtenir une indexation de leurs salaires dont le
pouvoir d'achat est sans cesse grugé par un taux d'inflation de
3400%; le 20 mars 85, l'armée dispersait les barricades érigées à La
Paz et l'Etat-major de l'armée faisait savoir au Président bolivien
que l'on attendait qu'il se démette d'ici un an, signalant sans
doute ainsi la fin du régime civil.(7) C'est encore la jeune
démocratie argentine mise à toute fin pratique au ban par le FMI et
dont le Président Alfonsin se vit contraint, le 19 mars 85, à aller
plaider la cause à la Maison Blanche, en déclarant qu'à défaut d'une
aide: "la conséquence immédiate serait que les démagogues de
toujours recherchent par la force des armes ce que la démocratie n'a
pas pu apporter".(8) Reagan, toujours fidèle à lui-même, promit de
faire lever le ban en échange d'un programme d'austérité, montrant
bien par-là son indifférence totale aux préoccupations du peuple
argentin; mais Reagan est aussi l'homme qui demande $14 millions
supplémentaires au Congrès pour financer les belles oeuvres des
contras nicaraguayens.
Force est donc de produire de plus en plus pour l'exportation,
ce qui signifie sacrifice de la production pour des fins sociales;
ce qui signifie encore une subordination nationale accrue puisque
les agents capables de produire pour l'exportation sont
essentiellement les producteurs de matières premières peu ou pas
transformées, et les multinationales étrangères, ce qui révèle tout
l'odieux de la stratégie; pire encore, s'il était possible, ce sont
les producteurs d'armes dont le rôle s'accroît.(9)
Il convient de noter, cependant, que les multinationales sont
moins à même que les banques de retirer leurs marrons du feu(10) et
sont de plus en plus contraintes à contribuer au développement du
"commerce de troc": aussi voit-on Volkswagen, qui construit des
"coccinelles" au Brésil, les exporter maintenant et opérer un ranch
dans ce pays - le bœuf étant revendu en Allemagne - pour assurer son
"cash flow". La même compagnie vend ses autos au Mexique contre des
paiements en café qu'elle se charge ensuite de revendre en
Allemagne.(11)
Cette lugubre réalité prend des formes encore plus
scandaleuses: ainsi en 1983 les pays latino-américains payèrent $40
milliards en intérêt ( à un taux de 14% !) pour une dette de
quelques $350 milliards, alors que leurs revenus annuels ne sont que
de $95 milliards. Ces remboursements étant de loin supérieurs aux
montants des nouveaux prêts pour la même année, nous assistons donc
à une exportation nette de capital.(12) Et cette ponction ne rend
pas compte des profits rapatriés par les multinationales. Plus
absurde encore, il faudrait ajouter à ceci la sortie de capitaux
attirés par les hauts taux d'intérêt américains: $35 milliards à ce
chapitre pour le seul Venezuela.(13) Aussi peut-on croire M. Leonard
Silk du New York Times sur parole lorsqu'il affirme que les banques
américaines ont rapatrié plus de $33.8 milliards en 1984, alors
qu'en 1982 elles avaient consenti des prêts à l'extérieur de
quelques $45.1 milliards.(14)
Le mécanisme est donc bien conforme à la stratégie des
Volcker/Reagan et Cie. Mais nous avons vu que nous ne saurions nous
bercer d'illusions quant à ses conséquences. Entre-temps, la
démocratie nicaraguayenne est harcelée par des contras soudoyés et
celles de la Bolivie et de l'Argentine, de même que leurs
populations et celles de nombreux autres pays, étouffent sous
l'emprise du garrot d'un monétarisme appliqué froidement à l'échelle
planétaire.
Du point de vue des populations des pays périphériques, et de
toute autre personne dont la sensibilité n'est pas entièrement
chloroformée, aux portes de la Réserve Fédérale, du FMI et de la
Banque Mondiale, pourrait tout aussi bien être inscrit
l'avertissement que Dante avait conçu pour la porte de l'Enfer:
"Lasciate ogne speranza, voi ch'intrate".
Dans ce contexte, dont nous n'avons pourtant tracé que les
grandes lignes, c'est avec un sens profond de tragédie que l'on
entend le Ministre des relations extérieures du Canada, Mme Vezina-
Parent, exposer ses prises de positions.(15) Ainsi plus question,
jusqu'à nouvel ordre (1995), d'un objectif de 0,7% du PNB pour
l'aide étrangère; au nom des restrictions budgétaires on devra se
contenter de 0,5%. Par contre, on nous propose un "partenariat avec
le secteur privé" et la contribution à un fonds d'urgence sous
l'égide du FMI et de la Banque Mondiale qui jointe à celle des
autres pays s'élèvera à $20-25 milliards! Ainsi MM. Volcker, Reagan,
de Larosière peuvent-ils continuer à dormir sur leurs deux oreilles:
c'est leur ligne de conduite que l'on adopte aussi pieusement! Le
gouvernement canadien actuel ne fera semble-t-il preuve ni
d'altruisme débridé, ni d'initiative créatrice telle la Conférence
sur le droit de la mer, qui pour avoir été ignominieusement avortée
par M. Reagan n'en portait pas moins en elle les germes d'un
environnement plus généreux à l'ensemble des êtres humains.
Ainsi, 37% de notre aide continuera à être bilatérale, 44%
multilatérale et 19% alimentaire. Un regard particulier sera accordé
aux secteurs de l'agriculture et de l'énergie en vue de soutenir nos
exportations. Pour le reste, on s'en remet à la générosité du public
(qui en vérité fait chaque fois ses preuves avec une abnégation que
le gouvernement serait bien venu "d'émuler", nonobstant la référence
par le ministre aux chômeurs canadiens, puisque l'on reconnaît
facilement, par ailleurs, que les projets de l'ACDI sont payants),
et l'on s'en remet aussi à ces nouveaux passe-partout en la matière,
les ONG, que M. Desjardins (Marcel) qualifie sans détour, et peut-
être sans lapsus, comme "ceux qui veulent faire du profit"! (Nombre
de ONG, faut-il le souligner, font un travail admirable avec de
faibles moyens).
Il s'agit là, croyons-nous, d'une politique à courte vue qui
s'accommode trop facilement de la structure de notre insertion dans
l'économie mondiale. Or, et cela n'est un mystère pour personne,
cette structure nous est défavorable à long et moyen termes
puisqu'elle défavorise nos exportations de produits entièrement
manufacturés même vis-à-vis de pays comme la Corée de Sud avec qui
nous accusons un déficit commercial de $478 millions en 1984.(16)
Mais les choix pourraient être différents:
(a) On pourrait travailler à l'augmentation véritable des
quotas du FMI et à l'assouplissement de ses conditions d'emprunt.
Puisque le FMI et Washington insistent pour un partenariat avec le
secteur privé, pourquoi ne pas chercher des moyens de fixer dans le
FMI ces capitaux errants qu'ils contribuèrent en grande partie à
créer? Le moyen serait simple: il suffirait de faire participer
minoritairement les capitaux privés aux quotas gouvernementaux; cela
aurait l'avantage d'accroître les sommes disponibles, d'enrayer les
mouvements spéculatifs si destructeurs de véritables stratégies de
croissance et contribuerait à faire des SDR la véritable monnaie de
réserve internationale. En effet, c'est moins l'aide extérieure
qu'il faudrait délier que les cordons des deux jumeaux de Bretton
Woods.
(b) Les fonds à la disposition du Groupe de la Banque mondiale,
en particulier ceux de l'Association Internationale de
Développement, devraient être accrus et leurs politiques de
développement suivre une voie qui ne serait pas forcément celle
tracée par la Réserve Fédérale et par l'aide bilatérale américaine.
Soulignons ici que la Banque Mondiale a depuis quelque temps reconnu
que sa politique de soutien à des projets comme les révolutions
vertes, n'a pas apporté les fruits escomptés, contribuant plutôt à
accélérer une différenciation sociale désastreuse dans les
campagnes.(17) L'emphase est maintenant plutôt sur le développement
des communautés villageoises. Or, ceci ne saurait être un progrès
que si l'on reconnaît aux communautés et aux gouvernements concernés
l'autonomie nécessaire tout en les "aidant" par ailleurs;
malheureusement, il semble bien que la politique de la Banque
Mondiale ait d'autres arrières pensées: pour elle, dans le cadre de
l'abandon du Quart Monde, il s'agit seulement d'assurer que la
production de subsistance (plus efficace dans le cadre des
communautés locales que dans celui des révolutions vertes ) soit
maintenue.
(c) Certains pays comme le Nicaragua, la Tanzanie etc
accomplissent des efforts sincères dans des conditions difficiles et
le Canada se doit de les soutenir fermement. Des programmes
conjoints, visant à partager notre technologie - et donc à remédier
à la structure de notre commerce - pourraient être développés avec
ces pays.
(d) Les discussions sur le Nouvel Ordre Economique
International doivent être relancées avec sérieux; sans cela la
nouvelle restructuration de l'économie mondiale sous la houlette des
monétaristes continuera à se faire aux dépens des pays les moins
nantis et il n'est pas sûr que cela nous soit vraiment avantageux.
Ceux qui s'auto-proclament réalistes aiment répéter que la
politique n'est que l'art du possible: elle pourrait au contraire
être la recherche de la création des possibles. Il serait bon de se
souvenir de ce qu'un grand historien américain, W.A. Williams,
écrivit: "Un monde sans utopie est comme un ciel sans étoiles; on
peut s'en accommoder jusqu'à ce que les ténèbres ne tombent."
REFERENCES
1) Sylvia Ann Hewlett& D.F. Burton Jr "The World Bank, the IMF and
US economic self-interst", US Today, March 1983, in World Politics
84/85
2) Tom Wicker, op cité (N.Y.T., nov.4,83, in World Politics 84/85
Cela prend en général 3 ans pour que les décisions d'augmenter les
quotas deviennent effectives. Celle-ci le devint en 84.
3) S.A. Hewlett & D.F. Burton, op cité.
4) Nicholas Kristof, in Le Devoir, 20 mars 1985
5) Idem
6) Philippie Norel, in Le Monde Diplomatique, mars 85
7) Le Devoir, 21 mars 85
8) Le Devoir, 20 mars 85
9) v. Le Monde Diplomatique, mars 85
10) Sur les réticences des multinationales v. Claude Julien, in Le
Monde Diplomatique, mars 85
11)Tom Wicker, op cité
12) Idem
13) Le Monde Diplomatique, mars 85
14) Leonard Silk "What goes up comes down" in N.Y.T., March 1,85
15) "L'aide publique au développement et le commerce international",
Conférence, UQAM, 4 mars 85 ( invité-e-s: Mme Vezina-Parent,
ministre des relations extérieures du Canada; M Louis Sabourin
(ENAP); M J. Brodeur, directeur de l'association québécoise des
organismes de coopération internationale; M Marcel Desjardins
(CEGIR)
16) Le Devoir, 8 mars 85 ( Notre déficit commercial avec l'ensemble
de la zone asiatique fut de $448 millions en 84; nos exportations
vers l'Asie et l'Océanie croissent cependant: elles passèrent de
$9,1 milliards en 83 à $10,4 milliards en 84).
17) v. Francine R. Frankel "Compulsion and social change" in World
politics, Jan 78. Voir aussi Henri Rouille , Coopérer autrement et
Patricia Adams & Ron Sullivan, in the name of progress, Double day
édition.
Montréal, mars 1985.
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