Fascisme et Racisme/Fascism and Racism

 

 

 


 

LAICITE OU LE RESPECT ABSOLU DE L'AUTRE

 

Les tentatives manipulatrices du "Mgr" Biffi visant à semer la zizanie dans le camp laïque dans l'espoir d'y faire émerger des relents de xénophobie "ordinaire" savamment justifiés et instrumentalisés ensuite par certaines "autorités morales" nous font monter la moutarde au nez.

Aux informations télévisées de la RAI (mardi 26 sept.2000), le professeur Sartori apparaît comme étant en accord avec Biffi en ce qui concerne la restriction de l'immigration en provenance tout particulièrement des pays islamiques. Ceci sous prétexte que les fondamentalistes musulmans seraient moins assimilables dans la société italienne. Moins assimilables que quelles autres personnes? Andreotti et Berlusconi sont de bons chrétiens parfaitement assimilés: ils n'ont pas eu beaucoup de mal à faire assimiler Gladio et les bases militaires américaines à trois quart de la population de la Péninsule! Nous en portons-nous mieux en tant que citoyens? Les Mafias et le crime organisé depuis Portella delle Ginestre sont éminemment assimilés y compris au sein même du système judiciaire comme les Di Pietro, Casini et Borelli peuvent encore en témoigner; on en arriverait tout naturellement à regretter le temps de l'occupation musulmane du sud de l'Italie et son ingénieux système villageois de distribution de l'eau dont plusieurs villes feraient bien de s'inspirer aujourd'hui encore! "Mgr" Giordano et ses "justes prix usuraires", Biffi et ses diaboliques pommes de discorde, Karol Wojtyla son anti-communisme niais et ses secrets de Fatima annonçant un curieux futur à son clergé sont, n'en doutons pas, parfaitement assimilés au sein de la République "laïque" italienne. Trop bien peut-être aux yeux d'un catholique libre-penseur tel que Mazzini! Nous en portons-nous mieux? Un pitre tel Montanelli profite du respect dû à un ancien -mais non à un idéologue- pour se faire ouvertement le chantre du salazarisme en cette époque où des Sergio Romano paraphrasant laborieusement des Furet et compagnie passent pour des théoriciens, ce qui ne l'empêche pas d'être considéré comme un modèle de journaliste par d'obséquieux Messire oui-oui, Messire non-non. Belle intégration du fascisme portugais dont même le Portugal ne veut plus depuis belle lurette! Nous en portons-nous mieux?

 

Je ne sais pas quelles sont au juste les opinions véritables du professeur Sartori: la télévision, ontologiquement réductrice, ne se prête pas aux développements d'un intellectuel de sa trempe. Cependant, ayant commis les notes intitulées "Le lit du néo-fascisme: la multiconfessionnalité et les valeurs néo-libérales contre la laïcité et l'égalité citoyenne", je me sens obligé de rappeler les éléments suivants afin que mon nom ne soit en rien associé à celui des parangons d'amour chrétien tel que ce Biffi:

1) Il n'y aurait pas eu de 1ère et de 2ème Renaissance italienne et occidentale sans le travail de préservation, d'élaboration et de diffusion entrepris pas la haute civilisation arabe et musulmane et par les Chrétiens entrés en étroit contact avec elle (Joachim de Flore lui-même doit une grande partie de son développement intellectuel à son voyage en "Syrie"). L'empire arabe et islamique vivait et développait une haute culture à un moment où l'Occident était encore plongé dans un obscurantisme intellectuel dû notamment au respect aveugle des dogmes religieux et séculiers approuvés par "l'Autorité" qui faisait office de démonstration et de preuve toute à la fois: autrement dit un obscurantisme dû à la domination théocratique.

 

2) Dans leur vie privée les gens ont strictement le droit de faire ce qui leur plait tant que leur liberté ne contraint pas celle des autres. Concernant certains irritants, notoirement les signes visibles, moins de la foi que de l'autoritarisme rigoriste des clergés, tels les croix, les kippas et les voiles islamiques, je suis porté à les considérer sur le même plan de l'atavisme esthétique que des modes plus courantes comme les chevelures mohawks, les teintures de cheveux bariolées ou encore les tatouages et le port d'anneaux: ceci relève plus de la branche de l'ethnologie étudiant l'utilisation sociale des "parures". Tant que ces choix personnels n'interfèrent pas avec la communalité et la vie publique, on ne voit pas pourquoi il faudrait s'en offusquer outre mesure: les goûts et les couleurs dit-on ne se discutent pas. Par contre, si la santé publique ou la vie républicaine en étaient notoirement affectées une sage régulation minimale serait un devoir citoyen. Par exemple, si certains tatouages mal faits risquent de diffuser des maladies graves, l'Etat se doit de réglementer la "profession" de tatoueur en certifiant ces praticiens. Si le port du voile interfère avec certains exercices physiques en classe, l'Etat se doit aussi d'intervenir; ce qui est déjà moins le cas dans les salles de cours ou dans les bibliothèques en autant qu'il n'y ait pas de prosélytisme. Par ailleurs, je serais un partisan farouche, en Occident, d'une méthode à l'Ataturk Turc à l'envers: pas d'imposition permanente dans la vie privée des individus mais l'exigence permanente du respect de tous des lois républicaines laïques, en particulier le libre choix des femmes et des enfants. Imposer le port du voile à une femme par la violence, en Occident, est aussi criminel que de pratiquer l'excision; par contre toute femme musulmanes ou autre à le droit de choisir elle-même le port du voile si cela lui chante: on connaît encore des femmes dans le sud chrétien qui portent châles et habits noirs en permanence; laissons ici le temps au temps et faisons confiance à une école républicaine que nous n'aurions pas abandonnée aux clergés, afin qu'elle puisse préparer la relève, ici comme ailleurs. Aussi, est-il de première importance, en Occident de traiter l'obligation du port du voile pour les adolescentes sur le même pied que les punitions corporelles et relevant de l'intervention immédiate des mêmes services sociaux que l'on aura préalablement refinancés pour qu'ils puissent mener leur mission d'intégration en douceur. C'est pourquoi j'ai écrit, un peu en guise de provocation, que les hommes cherchant à imposer le port du voile (ou toute autre restriction semblable) devraient être eux-mêmes soumis à ces mêmes restrictions dans leurs formes les plus rigoristes: dans un monde moderne et tolérant chacun de nous doit apprendre à remplacer la force par la persuasion. Le rôle de l'Etat laïque est justement de s'en assurer.

 

Cela dit, j'estime que les bou-bous arabes et les keffiehs ainsi que les saris et les robes africaines rivalisent facilement avec la haute couture. Là encore ce n'est pas l'habit mais la relation sociale derrière l'habit qu'il convient de comprendre: pourquoi les hommes ne portent-ils pas quotidiennement les magnifiques bou-bou brodés de soie en Occident? S'il s'avérait que des raisons de pression des paires ou de simple practicalité leur font préférer le costume trois pièces ou le blue-jean pull-over, pourquoi en irait-il autrement pour les femmes? Les clergés doivent rapidement procéder à un aggiornamento dans ce domaine: c'est à eux de s'adapter pas à la république laïque. Reste que les laïques ou mêmes les religieux arabes, africains et autres devraient méditer l'histoire du développement du costume trois pièces et la contribution de l'avant-garde russe, particulièrement Tatlin, dans leurs recherches d'un habit pratique et élégant à la fois tout en restant seyant pour le travailleur moderne en tant que citoyen égal de tout autre citoyen malgré ses différences de goût. Cette expérience devrait être émulée et, de fait commence à l'être.

 

3) Le seul intégrisme véritablement encombrant en Italie depuis la Donation de Constantin, un faux très chrétien comme chacun sait depuis Laurent Valla, est l'intégrisme du Clergé catholique et, de plus en plus, celui des adeptes de toutes tendances déterminés à reconstruire le Temple à Jérusalem afin de créer les conditions nécessaires aux guerres entre civilisations (lire guerres de religion) voulues par les Huntington afin de poser les bases de la domination mondiale de l'impérialisme américain et de l'asservissement du libre arbitre à la trique des directeurs de conscience ecclésiastiques dans cette nouvelle alliance du sabre, du Veau d'or et du goupillon. Ce lent travail de sape est à craindre partout, spécialement en matière d'éducation et de morale conservatrice. Pour un citoyen laïque, il ne saurait y avoir d'autres autorités que les lois républicaines et les règles méthodologiques et déontologiques de recherche et d'investigation libres qui informent sa propre conscience.

4) L'Italie constitue un des grand pays du pourtour méditerranéen. L'histoire en a fait un des dépositaire d'une culture commune, "oecuménique" (au sens des stoïques) des peuples du bassin méditerranéen sans exclusion aucune, ce qui serait une contradiction dans les termes. Les manigances de Biffi visant à créer une chienlit xénophobique constitue un affront aux intérêts stratégiques et économiques du pays et à son devoir de coexistence en Méditerranée et doivent être dénoncées comme tel sans aucune fioriture superflue: quelles qualifications Biffi possède-t-il en ces domaines alors qu'il manque ouvertement aux plus simples préceptes de son propre credo d'amour chrétien?

En ce qui concerne l'immigration en provenance des pays du sud méditerranéen, elle constitue une richesse culturelle qui nous a nourri par le passé et qui continuera à le faire; par sa diversité, elle représentera sûrement un antidote aux divagations claustrophobiques torchées au papier de Hollande d'un Biffi et consort. Les immigrants ne sont en aucun cas responsables des lacunes des politiques d'intégration des pays hôtes et, l'Italie, malgré quelques bons efforts en ce domaine neuf, et quelques pitoyables performances aussi, devra apprendre à innover. Il est clair cependant qu'un flux contrôlé d'immigrants du sud méditerranéen et de l'Afrique, déjà nos semblables culturellement en bien des points de vue qui dépassent la compréhension vénale d'un Biffi (v. Braudel et tous les autres) ou bien de tout autre région de la planète, représente le meilleur remède pour garantir une bonne croissance de la population et ultimenement la bonne marche du système productif et du système public des retraites. En outre, des régions comme la Sila s'enorgueillissaient jadis de leurs privilèges de terres d'asile: cette tradition précieuse ne peut pas être déprisée par des bigots. J'ai argumenté ailleurs sur l'opportunité de reformuler les fonds structurels européens afin de tenir compte simultanément du nécessaire influx migratoire, de la croissance économique et de la réduction systématique du taux de chômage (1) Bien entendu, tout soutien massif de l'Etat italien à une politique de natalité calquée sur celle de l'ex-RDA (i.e. 3 ans de congés parentaux alliés au retour garanti à son poste de travail sans perte de séniorité etc...) serait bien venu surtout du fait que la baisse du taux synthétique de fécondité représente, en partie, un décalage des naissances dépendant des nécessités de carrière, des femmes notamment. Ceci ne serait en rien antithétique à une bonne politique d'immigration, mais je doute que l'Etat italien actuel soit disposé à en assumer les coûts. Pour éviter que nous ne soyons plus qu'une quarantaine de millions de têtes de pipes d'ici 25 ans, ne comptant plus pour grand chose même sur l'échiquier européen, mieux vaudrait compter sur la solidarité active de nos soeurs et frères méditerranéens, arabes, africains ou autres! Il importe donc qu'aucun aspect de la politique d'accueil et d'intégration ne soit négligé.

 

 

Répétons-le, le danger principal pour la République laïque n'émane pas des groupes minoritaires tant que la République ne trahit pas elle-même ses propres lois. Le danger, mortel pour nos institutions, vient de toute tentative de confondre la multiconfessionnalité, nécessaire au niveau privé dans une société laïque donc tolérante, avec la laïcité qui est seule garante des droits de tous y compris des agnostiques, des libre penseurs et des athées. Or, en Italie cette confusion est surtout propagée par les milieux catholiques qui cherchent à instrumentaliser les "droits" des minorités afin d'y faire inclure le droit à la multiconfessionnalité sur fonds publics. Bien entendu, une fois cette brèche acquise contre les lois laïques républicaines, notamment en matière d'éducation et d'écoles privées, les Ratzinger plus ouvertement exclusivistes et intellectuellement impérialistes deviendront vite la dominante avouée du clergé catholique italien, le groupe religieux majoritaire. Tous y compris le professeur Sartori devraient garder les enjeux réels bien en vue. Tous devraient refuser de céder le moindre pouce en matière de protection constitutionnelle et de pratique quotidienne de la laïcité..

 

Mieux, dans l'actuel climat délétère, et jusque tant que le haut clergé et le Vatican-CIA n'abandonnent pas leurs machinations visant à desconstruire la République laïque, les citoyens devraient être prêts à organiser des barrages filtrants pour les touristes autour de Vatican chaque fois que les immixtions se feront trop ouvertes et pesantes. En l'honneur des autres peuples méditerranéens qui sont une part de nous mêmes depuis la nuit des temps ces barrages filtrants pourraient arborer des voiles et des keffiehs ainsi que le drapeau de la république et les drapeaux rouge et noir de la Sociale.

 

        Paul De Marco

       Richmond Hill, le 27 septembre 2000.

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1) Voir les paragraphes portant sur l'immigration et fonds structurels européens dans mes notes intitulées: "Retraites, Fonds ouvriers et logement social".

 

 

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